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Accident to a Alexander Schleicher ASW27 registered F-CLCC on 03/03/2015 at Villars-Colmars (04)

Perte d’ascendance lors d'un vol de pente, atterrissage forcé, collision avec des arbres

Responsible entity

France - BEA

Investigation progression Closed
Progress: 100%

1 - DÉROULEMENT DU VOL

Le pilote décolle par remorquage de l’aérodrome de Château Arnoux Saint-Auban (04) vers 13 h 50, pour réaliser un circuit. Après environ 2 h 30 de vol, il suit une ligne de crête en direction du nord-est (repères 9 à 11) vers le sommet du Denjuan. Il spirale dans une ascendance pour prendre de l’altitude. Après plusieurs tours, le pilote se trompe en prenant un cap vers l’est (repère 12) qui lui fait franchir la ligne de crête. Il se retrouve sous le vent du relief dans une zone de forte descendance (repères 12 à 13). Le pilote tente néanmoins de regagner de l’altitude (évolutions entre les repères 13 et 14) avant de décider d’interrompre le vol et d’atterrir sur le versant est, enneigé, du Caduc (repère 14). Il se retrouve au-dessus d’une zone boisée, le planeur touche la cime des arbres. Les ailes sont arrachées. Le fuselage passe entre les arbres avant de toucher le sol enneigé. Le pilote indemne vérifie que la balise de détresse émet, il tente sans succès de joindre le CNVV(1) par radio et par téléphone. La nuit arrivant, il décide de passer la nuit dans la cabine du planeur. Il est récupéré le lendemain matin par les secours.

2 - RENSEIGNEMENTS COMPLÉMENTAIRES
2.1 Trajectographie


Le planeur était équipé d’un Flarm et le pilote disposait d’un récepteur GNSS portable de type MLR(2). Les données du récepteur GNSS ont été exploitées et compilées avec les données FLARM d’autres planeurs évoluant dans le même secteur pour obtenir la trajectoire du vol.

2.2 Examen du site et de l’épave

Le site de l’accident se situe sur le versant est du Caduc à 1 890 mètres. L’épave est en lisière d’une zone boisée dans une forte pente. Les ailes ont été arrachées du fuselage lors du choc initial avec la cime des arbres. Le fuselage est rompu au milieu de la poutre de queue. Le poste de pilotage ne présente pas de dommages majeurs. Néanmoins, des traces de frottement avec les arbres sont visibles sous le fuselage.

Une vue générale de la zone de l’accident met en évidence des zones dégagées d’obstacles et de faible déclivité dans les environs immédiats pouvant convenir à des atterrissages forcés.

2.3 Conditions météorologiques

Les cartes présentées lors du briefing du matin montrent un vent variable de secteur sud-ouest à nord-ouest pour 5 kt à 500 mètres, un vent de secteur nord-ouest pour 35 kt à 3 000 mètres. L’isotherme 0° se situait à 2 400 mètres.

Le coucher du soleil était à 18 h 26.

2.4 Renseignement sur le pilote

Le pilote, âgé 65 ans, titulaire d’une licence de pilote de planeur délivrée le 6 août 1968, totalisait 1 500 heures de vol dont 820 en zone de montagne et 1 h 15 dans les trois mois précédents. Il détenait la qualification « circuit 300 km » depuis 2000.

Il était arrivé au CNVV la veille pour un stage de perfectionnement (cf. 2.6 Organisation des stages et déroulement des vols).

Le matin du jour de l’accident, il avait fait un vol d’environ 1 h 15 avec un instructeur avant d’être autorisé à effectuer des vols seul.

2.5 Témoignage du pilote

Le pilote indique qu’il avait pour consigne de son instructeur de ne pas aller à l’est du sommet du Caduc. Arrivé au sommet du Caduc, mais pensant être au sommet de Denjuan, il a pris une ascendance et fait plusieurs tours rapides pour observer un aigle qui se trouvait non loin de lui. Alors que le planeur atteignait une altitude de 2 400 mètres, le pilote a décidé de prendre le chemin du retour en suivant le même cheminement qu’à l’aller. Il a suivi une ligne de crête qu’il pensait être celle entre le sommet du Caduc et le sommet du Denjuan orientée nord-sud, mais désorienté par les manoeuvres rapides, il était sur la ligne de crête du Puy, orientée à l’est. Le pilote précise qu’il n’a pas vérifié son cap sur le compas magnétique qui lui aurait permis de constater son erreur. Il s’est aperçu qu’il était « sous le vent » de la montagne dans une zone de fortes descendances. Il a estimé qu’il ne pouvait pas franchir la ligne de crête située à l’ouest ni celle située au sud de sa position pour revenir sur le versant « au vent » de la montagne(3). Il a subi une très forte perte d’altitude et s’est retrouvé dans un petit vallon orienté sud-nord. Le pilote a décidé(4) d’atterrir sur le versant est enneigé et boisé au cap 340 en travers de la pente.

2.6 Organisation des stages et déroulement des vols

Le CNVV propose plusieurs stages de pilotage de planeur en montagne, classés par niveau(5) en fonction de l’expérience du pilote. Le descriptif des stages est disponible sur le site du CNVV(6). Plusieurs guides sont à la disposition du stagiaire et définissent les règles et consignes à appliquer lors des stages :

  • le guide d’accueil du CNVV(7);
  • le manuel de sécurité du vol en montagne(8).

Les pilotes font le premier vol avec un instructeur, quelle que soit leur expérience. A l’issue, l’instructeur détermine si le pilote peut partir seul en vol. Un instructeur est en charge de trois pilotes.

Le règlement interne au CNVV impose au pilote une vacation radio toutes les 20 minutes au cours de laquelle le pilote doit transmettre entre autres sa position, son altitude et ses intentions.

2.7 Témoignage de l’instructeur

L’instructeur, qui était en vol, indique que le dernier contact radio avec le pilote avait eu lieu vers 16 h 20. Vers 17 h 00, en l’absence de contact radio(9), il a essayé sans succès de joindre par radio le pilote du planeur. Vers 17 h 15, il a demandé aux autres pilotes en vol dans le secteur de contacter le pilote du planeur sans succès. Il a atterri sur l’aérodrome de Château-Arnoux-Saint-Auban vers 17 h 45. Les appels sur le téléphone portable du pilote ont été infructueux, ainsi que les contacts avec les aérodromes voisins. Vers 18 heures, la disparition du planeur a été signalée au RCC de Lyon Mont-Verdun qui a déclenché une alerte et les recherches.

2.8 Recherches

Un hélicoptère de la sécurité civile s’est rendu sur la dernière position connue(10) (peu après le repère 12) du planeur pour tenter de le localiser. La balise de détresse du planeur a été perçue par les avions commerciaux en vol dans le secteur et cette information a été relayée vers le RCC. Néanmoins, la localisation de cette balise était imprécise, avec une incertitude de positionnement d’environ 2 NM. Le pilote du planeur a aperçu vers 19 h 20 un hélicoptère mais il n’a pas été repéré par les secours
en raison de la nuit. Le pilote n’avait pas de moyens pour signaler sa présence(11). Les recherches ont été interrompues à 21 h 45. Le lendemain matin, la position de la balise a pu être affinée et l’hélicoptère a été envoyé sur la nouvelle zone de recherche.
Le pilote a été localisé et récupéré à 8 h 40.

3 - CONCLUSION

L’accident est dû à la décision du pilote de poursuivre le vol dans des conditions aérologiques défavorables en tentant de reprendre de l’altitude et de cheminer le long de la pente en direction d’une zone boisée qui offrait peu d’opportunité pour un atterrissage en sécurité.

Ont pu contribuer à l’accident :

  • la désorientation du pilote lors d’une évolution dans une ascendance qui l’a conduit à prendre une direction erronée ;
  • le franchissement d’une ligne de crête lors d’une évolution conduisant le planeur à évoluer sous le vent du relief dans une zone de fortes descendances.

 

(1)Centre National de Vol à Voile.
(2)Utilisé comme traceur pour la restitution du parcours après le vol par le pilote.
(3)Le pilote se situait sur le versant Est entre les sommets du Denjuan et de Sangraure.
(4)La trajectoire entre les repères 13 et 14 semble indiquer que le pilote a fait plusieurs évolutions
et probablement cherché à exploiter des ascendances et à regagner de l’altitude avant d’atterrir.(5)Niveau 1 : découverte montagne, niveau 2 : perfectionnement, niveau 3 : performance.
(6)cnvv.net Stages-Montagne
(7)cnvv.net/IMG/pdf/cnvv_guide_vf_v4.pdf
(8)cnvv.net/IMG/pdf/securitevolmontagnefrancaise_2.0_.pdf
(9)Il peut arriver que pour des problèmes de portée radio ou de relief, le contact ne soit pas entendu par l’instructeur.
(10)La dernière position a été obtenue à partir des données des FLARM des planeurs évoluant dans le
même secteur. Peu après le repère 12, le planeur était masqué par le relief et n’était plus visible par les autres planeurs qui évoluaient plus à l’ouest.
(11)La réglementation ne l’impose pas.