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Décollage intempestif, collision avec une station d'avitaillement

Décollage intempestif, collision avec une station d'avitaillement

Responsible entity

France - BEA

Investigation progression Closed
Progress: 100%

1 - Déroulement du vol

Le pilote et le passager sortent le F-GMLZ du hangar et le placent à une distance comprise entre 5 et 10 mètres de la station d’avitaillement. L’hélicoptère se trouve alors face à l’est, avec la poutre de queue du côté de la station. Après avoir ajouté un complément de carburant dans les réservoirs, le pilote met en route le moteur et effectue les actions afférentes. De la buée est présente sur la verrière et le pilote tire la commande d’entrée d’air frais. Plus de deux minutes après la mise en route, la buée étant toujours présente, le pilote essuie la verrière avec sa main droite. Dix secondes après la fin de cette action(1), la buée est toujours présente et le patin droit quitte le sol en premier. Après un léger mouvement de lacet vers la droite, le F-GMLZ vire à plat vers la gauche d’environ 20 degrés puis commence une translation vers l’arrière en prenant de la hauteur. Il passe à une hauteur comprise entre 1 et 2 mètres au-dessus de la station d’avitaillement. Le F-GMLZ s’incline ensuite brutalement vers la gauche avec une assiette longitudinale en diminution avant d’entrer en contact avec le toit de la station d’avitaillement.

2 - Renseignements complémentaires

2.1 Renseignements sur l’hélicoptère

Le R22 dispose notamment :

d’une entrée d’air frais permettant, en tirant une commande située sur le panneau central, d’amener de l’air frais le long de la verrière dans le but de la désembuer ou de ventiler la cabine de l’hélicoptère ;

d’une fenêtre de ventilation sur chaque porte pour améliorer la circulation de l’air dans la cabine ;

d’un système de chauffage de la cabine, option présente sur le F-GMLZ, commandé par un bouton permettant d’actionner un ventilateur électrique et ajusté par une poignée de contrôle.

2.2 Renseignements sur l’épave

L’examen de l’épave n’a pas mis en évidence de dysfonctionnement susceptible d’avoir contribué à l’accident. De même, cet examen, associé à l’exploitation des enregistrements vidéo, n’a révélé aucun contact entre l’hélicoptère et la station d’avitaillement pouvant expliquer la perte de contrôle.

Concernant les systèmes de ventilation, désembuage et chauffage, l’analyse de l’enregistrement de la caméra de surveillance et de l’épave révèle que :

la commande d’entrée d’air frais était à moitié tirée ;

les fenêtres de ventilation des portes étaient fermées ;

le bouton du système de chauffage était en position OFF.

2.3 Expérience et témoignages du pilote

Le pilote, titulaire d’une licence PPL(H), totalisait environ 258 heures de vol en hélicoptère dont 198 en tant que commandant de bord et une heure dans les trois mois précédents dont 30 minutes sur type.

Le pilote indique qu’il a placé l’hélicoptère dos à la station d’avitaillement pour pouvoir translater de manière directe et limiter ainsi des virages près du sol. Il précise qu’après avoir ajouté un complément de carburant dans les réservoirs (plein complet), il a enlevé les commandes du côté du passager puis effectué les actions de mise en route du moteur. Il indique que, lorsque la verrière s’est recouverte de buée, il a activé le système de désembuage en tirant sur la commande d’entrée d’air. Il explique qu’il n’a pas complètement tiré sur cette commande dans la mesure où cette seule action était habituellement efficace. Il ajoute qu’il n’avait jamais été confronté à autant de buée. Sans évolution du désembuage, il décrit qu’il a lâché la commande de collectif pour essuyer la verrière avec sa main droite et qu’il a tenu le manche cyclique avec la main gauche. Il a ensuite replacé sa main gauche sur la commande de collectif et sa droite sur le manche cyclique. Il affirme que la présence de buée associée à la position basse du soleil ne l’a pas amené à envisager de décoller. Il explique cependant qu’il a probablement placé la commande de pas collectif en position haute par habitude lorsqu’il est prêt au décollage et qu’il a reçu l’autorisation de translater.

II ajoute qu’il n’a perçu ni le décollage ni la translation vers l’arrière(2) . Il estime qu’il a pu lâcher le manche cyclique pour essuyer à nouveau la verrière sans savoir que l’hélicoptère avait quitté le sol. Il est également à noter que lors du premier entretien après l’accident, le pilote, qui n’avait pas encore vu l’enregistrement de la caméra de surveillance, a signalé que l’hélicoptère était resté au sol.

2.4 Renseignements météorologiques

Les conditions météorologiques étaient les suivantes :

vent du 020° pour 3 kt avec des rafales maximales de 6 kt ;

visibilité comprise entre 9 et 10 km ;

pas de nuage significatif ;

température de 08 °C et température du point de rosée de 7,5 °C.

L’heure de lever du soleil(3) était 6 h 20. A 6 h 51, le soleil se trouvait 3,5 degrés au-dessus de l’horizon et son azimut(4) était de 60 degrés.

3 - Enseignements et conclusion

Lorsque le pilote et le passager se sont installés à bord du F-GMLZ, l’humidité relative dans le poste de pilotage, probablement élevée suite aux différents efforts effectués par les deux hommes en vue du vol (sortie du hangar de l’hélicoptère et complément carburant) a favorisé l’apparition de buée sur la verrière. Le fait que la commande d’entrée d’air frais n’ait pas été tirée au maximum a ralenti le désembuage.

L’habitude inappropriée de positionner la commande de pas général vers le haut dès qu’il était prêt au décollage a, dans les conditions du jour, provoqué le décollage involontaire et non détecté compte-tenu de la présence de buée sur la verrière et de la position du soleil. L’absence d’actions aux commandes de la part du pilote, qui maintenait la commande de collectif avec la main gauche et le manche cyclique avec la main droite, a entraîné une certaine stabilité de l’hélicoptère lors de la translation vers l’arrière.

Lors du passage de l’hélicoptère au-dessus de la station d’avitaillement, il est possible que le pilote, ignorant que l’hélicoptère était en vol, ait lâché le manche cyclique pour essuyer à nouveau la verrière embuée, ce qui a déstabilisé la trajectoire et conduit à la perte de contrôle puis à la collision avec la station d’avitaillement.

D’une manière générale, en l’absence de références visuelles extérieures suffisantes (buée, position du soleil, nuit…) ou tant que toutes les conditions ne sont pas réunies pour entreprendre le décollage, tout mouvement non intentionnel doit être évité en s’assurant pour les avions que les freins sont appliqués (cf. rapport BEA f-tc131113)(5) et pour les hélicoptères que la commande de pas collectif soit en position basse (petit pas).

 

(1)Information à partir d’enregistrements de caméras de surveillance de l’aéroport orientées vers la station d’avitaillement.

(2)Le passager indique également ne pas avoir perçu le mouvement de l’hélicoptère.

(3)Instant où l’on voit le premier rayon solaire apparaître.

(4)Angle dans le plan horizontal à la position du F-GMLZ entre le nord et la direction du soleil.

(5)http://www.bea.aero/docspa/2013/f-tc131113/pdf/f-tc131113.pdf