Heurt du fuselage avec la piste lors de l'atterrissage de nuit
Heurt du fuselage avec la piste lors de l'atterrissage de nuit
Déroulement du vol
Les éléments suivants sont issus des données FDR et de témoignages.
L'équipage décolle à 16 h 34 de l'aérodrome de Copenhague, à destination de Grenoble. Vers 17 h 53, l'équipage débute la descente pour une approche ILS en piste 09. Les conditions météorologiques à l'arrivée sont des conditions de vol à vue, de nuit avec un vent d'est de 8 kt. La lune encore sous l'horizon au moment de l'arrivée ainsi que la couverture nuageuse masquant les étoiles rendent la nuit particulièrement sombre. Le balisage lumineux de la piste et de la rampe d'approche est réglé sur le niveau le plus faible.
L'équipage est établi sur le localizer à environ 10 NM du seuil de piste et a la piste en vue.
A 18 h 23, à une hauteur de 1 500 ft environ, l'avion est sur les axes de l'ILS à une vitesse indiquée (IAS) de 157 kt, trains sortis, en configuration « 28 »(2) , pilote automatique et auto-manette engagés. La Vapp retenue est de 137 kt. Le sélecteur d'éclairage des phares d'atterrissage du train avant est en position basse intensité (position « DIM »).
A une hauteur de 1 000 ft environ, l'équipage déconnecte le pilote automatique. L'avion est stabilisé à une vitesse légèrement supérieure à Vapp sur le plan de descente et avec une vitesse verticale de - 700 ft/min.
A une hauteur d'environ 200 ft, le PF déconnecte l'auto-manette. La position des manettes recule légèrement et les EPR diminuent également. La position des manettes de poussée restera à partir de ce moment inchangée jusqu'au passage en position reverse.
L'approche reste stabilisée sur le plan de descente de 3° à une vitesse égale à Vapp + 3 kt et un taux de descente de 700 ft/min jusqu'à une hauteur de 100 ft.
Au passage des 100 ft, l'IAS commence à diminuer et passe en dessous de Vapp. Le taux de descente augmente et atteint 850 ft/min. L'assiette longitudinale est de 4° à cabrer et commence légèrement à augmenter.
A une hauteur de 30 ft, l'avion passe légèrement sous le plan de descente et l'IAS est de Vapp - 4 kt.
A une hauteur de 15 ft, la gouverne de profondeur est actionnée brutalement à cabrer entrainant une augmentation rapide de l'assiette longitudinale.
Deux secondes plus tard, l'arrière du fuselage touche la piste, avec une assiette longitudinale de 10,7°. Les traces laissées sur la piste indiquent un point de contact 166 mètres avant la zone de toucher des roues. La valeur de l'accélération verticale atteint un maximum de 1,95 g. Deux secondes plus tard, les manettes de poussée sont ramenées vers l'arrière et les inverseurs de poussée sont déployés. L'avion roule ensuite jusqu'au parking.
CONCLUSION
L'accident est dû à la poursuite de l'atterrissage alors que la conscience de la situation de l'équipage s'était dégradée. Ceci a entraîné une estimation erronée de la hauteur par rapport au point d'aboutissement de la trajectoire et une absence d'arrondi.
Les facteurs suivants ont contribué à l'accident :
- l'équipage n'a pas sélectionné l'éclairement maximal de ses phares d'atterrissage ;
- la piste 09 de l'aérodrome de Grenoble-Isère n'est pas équipée d'indicateur visuel de pente d'approche ;
- la gestion de la poussée en manuel pour atterrir était inadaptée.
Recommandations
Rappel : conformément au règlement européen n° 996/2010 sur les enquêtes accidents, une recommandation de sécurité ne constitue en aucun cas une présomption de faute ou de responsabilité dans un accident ou un incident. L'article R.7312 du Code de l'aviation civile et le règlement européen n° 996/2010 stipulent que les destinataires des recommandations de sécurité font connaître au BEA, dans un délai de 90 jours après leur réception, les suites qu'ils entendent leur donner et, le cas échéant, le délai nécessaire à leur mise en œuvre.
Indicateur de pente d'approche
L'Annexe 14 de l'OACI stipule qu'un indicateur visuel de pente d'approche doit être installé si la piste est utilisée par des avions turboréacteurs.
Par ailleurs, un indicateur visuel de pente d'approche aurait facilité la transition entre le pilotage aux instruments et le pilotage à vue et aurait permis à l'équipage de ne pas focaliser ses ressources au maintien à vue de la pente d'approche.
En conséquence, le BEA recommande que :
- la DGAC s'assure du respect du paragraphe 5.3.5.1 de l'Annexe 14 de l'OACI pour tous les aérodromes français concernés.
Conservation des données CVR
Aucune action visant à conserver l'enregistrement CVR après l'accident n'a été entreprise par l'exploitant de l'aéronef. Des données relatives à l'événement ont alors manqué à l'enquête de sécurité. Par ailleurs, la réglementation européenne (règlements EU-OPS n° 859/2008 et n° 996/2010) oblige à ce que toutes les mesures nécessaires pour éviter l'effacement des enregistrements de conversations soient prises en cas d'accident ou d'incident grave. De nombreux cas identiques ont été constatés par le passé.
En conséquence, le BEA recommande que :
- l'Administration de l'Aviation Civile du Danemark (SLV) vérifie que les consignes opérationnelles des exploitants sous sa tutelle permettent d'assurer la préservation dans les plus brefs délais des données CVR, à la suite d'un accident ou un incident grave, conformément aux obligations de l'EU-OPS 1.160 et du règlement européen n° 996/2010 (article 13.3).