Manoeuvre d'évitement dans le circuit d'aérodrome
Manoeuvre d'évitement dans le circuit d'aérodrome
Séquence ambiguë dans la circulation d'aérodrome
Déroulement des vols
La piste 07R de l'aérodrome de Brest est en service. Les conditions météorologiques permettent la réalisation d'approches à vue. La séquence décrite ci-après implique les avions suivants :
1. un CRJ 100 en provenance de Marseille qui s'intègre en vent arrière main gauche après avoir été autorisé pour une approche à vue ;
2. un B 737 en entraînement qui effectue des posés - décollés ;
3. un CRJ 700, en provenance de Lyon, en contact avec le contrôleur d'approche pour une approche à vue main gauche. Le commandant de bord est PF ;
Deux autres avions sont également sur la fréquence tour :
4. un DR 400 en provenance de Morlaix en attente au sud ;
5. un Cessna Caravan qui est au départ pour un vol VFR à destination d'Ouessant.
Lorsque l'équipage du CRJ 100 contacte le contrôleur tour, il reçoit l'information suivante : « Vous serez numéro deux. Le trafic précédent, un B 737 en début de vent arrière nord ». L'équipage indique qu'il a le B 737 en vue et reçoit alors l'instruction suivante : « Donc vous êtes numéro deux derrière et vous rappelez en finale. Ajustez votre vol en fonction ». L'équipage collationne.
Une minute et demie après, l'équipage du CRJ 700 est transféré sur la fréquence tour. Il reçoit l'information suivante alors que le B 737 est sur la piste : « Vous serez numéro deux. Le trafic précédent, un B 737 en montée initiale piste 07R. Rappelez en vue. » Il répond que le B 737 est en vue et reçoit alors l'instruction suivante : « Donc vous êtes numéro deux derrière. Vous rappellerez en finale. Ajustez votre vitesse en fonction. » L'équipage collationne : « On ajuste en fonction du B 737 au décollage et on sera numéro deux ». Juste après, le contrôleur autorise l'équipage du CRJ 100 à l'atterrissage. L'équipage du CRJ 700 déduit qu'il est numéro deux derrière le CRJ 100 en finale, que le B 737 est au départ et qu'il doit ajuster sa vitesse en fonction de ce décollage. Le contrôleur n'a pas explicitement informé l'équipage du CRJ 700 que le B 737 effectuait des posés - décollés et se reportait en vent arrière (figure 1).
Le contrôleur indique successivement au pilote du DR 400 de continuer l'attente, confirme à l'équipage du B 737 qu'il est numéro un et autorise celui du Cessna Caravan au décollage.
L'équipage du CRJ 700 voit soudain le B 737 couper sa trajectoire et se positionner devant lui en vent arrière ; il reçoit un TA de son TCAS. L'équipage du CRJ 700 effectue une manœuvre d'évitement par la gauche (figure 2).
Constatant que la séparation est insuffisante et que sa vitesse est plus élevée, il demande l'autorisation d'effectuer un « 360 » de retardement par la droite (figure 3).
Le contrôleur l'y autorise et lui précise : « pour votre information, le B 737 s'établit en finale pour un toucher ». L'équipage du CRJ 700 collationne.
L'équipage du Cessna Caravan qui décolle est autorisé à transiter à 1 000 ft et reçoit l'information de trafic du CRJ 700 en étape de base éloignée. A l'issue du « 360° », le TCAS du CRJ 700 déclenche une nouvelle alarme ADVISORY (séparation de 800 ft et 1 NM) en raison de la proximité du Cessna Caravan. Au même moment, l'équipage reçoit l'information de trafic sur le Cessna Caravan.
Renseignements complémentaires
Approche
L'approche est gérée par l'organisme militaire de contrôle de Landivisiau. Pour les approches à vue en piste 07R, les avions en régime IFR sont transférés à la tour à 3 000 ft.
Clairance d'approche à vue
Sur la fréquence de l'approche, l'équipage du CRJ 700 avait reçu l'information de trafic suivante : « Numéro deux en approche derrière un CRJ 100 ». Sur cette même fréquence, l'équipage du CRJ 100 lui a signalé « qu'un Boeing tournait en 25 ».
Le contrôleur d'approche a d'abord autorisé l'équipage du CRJ 700 à effectuer une approche à vue, puis lui a indiqué que le contrôleur tour refusait cette approche en raison du trafic important. Enfin, il l'a de nouveau autorisé peu avant le transfert de fréquence.
Vols d'entraînement
Pour permettre la régulation du trafic, le manuel d'exploitation de l'aérodrome prévoit que les vols d'entraînement soient soumis à l'accord du chef de la circulation aérienne, après avis du gestionnaire, en l'occurrence la chambre de commerce.
Le chef de la circulation aérienne et son adjoint n'étaient pas disponibles dans les jours précédant l'événement. Dans ce contexte, la chambre de commerce a accepté le vol d'entraînement du B 737 sans en informer le service du contrôle. De ce fait, la perturbation induite par le vol d'entraînement sur la gestion du trafic n'a pas pu être anticipée.
Enseignements
Phraséologie
Les informations de trafic communiquées à l'équipage du CRJ 700 l'ont désigné comme « numéro deux » derrière le CRJ 100 d'après le contrôleur d'approche et derrière le B 737 d'après le contrôleur LOC. En réalité, le CRJ 700 était en troisième position à l'atterrissage derrière ces deux avions. Cette erreur a conduit l'équipage du CRJ 700 à penser qu'il était en deuxième position derrière le CRJ 100.
Le contrôleur tour a demandé aux équipages du CRJ 100 et CRJ 700 d'ajuster leur vol et leur vitesse. Cette phraséologie a amené le commandant de bord du CRJ 700 à penser qu'il s'agissait d'une clairance de séparation à vue implicite, même si les conditions n'étaient pas remplies. Ceci n'a pas favorisé la recherche visuelle du B 737 par l'équipage. Cette ambiguïté découle en partie des similitudes de moyens pour assurer l'anticollision entre l'approche à vue et la séparation à vue (cf. encadré ci-dessus).
Information de trafic
La trajectoire du B 737 était inhabituelle et pouvait surprendre. Le contrôleur tour n'a pas indiqué à l'équipage du CRJ 700 que le B 737 effectuait des posés-décollés et devait se reporter en vent arrière. L'équipage de l'autre CRJ avait mentionné la présence du B737 sur la fréquence de l'approche. Ce message, n'ayant par ailleurs pas fait l'objet d'une information de trafic formalisée, a pu être interprété de manière différente par les deux membres d'équipage, sans lever de doute, à un moment où la charge de travail du PF était élevée.