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Virage engagé lors d'une approche interrompue, collision avec le sol en instruction solo

Virage engagé lors d'une approche interrompue, collision avec le sol en instruction solo

Responsible entity

France - BEA

Investigation progression Closed
Progress: 100%

1 - Déroulement du vol

L’élève pilote accomplit le dernier vol de son cursus de formation en vue de l’obtention du brevet de pilote ULM Classe 1 (paramoteur). Il dispose d’une radio portable. Il est en contact avec son instructeur au sol. Le vent est du 280° pour 8 kt.

L’élève est en approche vers la zone utilisée habituellement par les ULM paramoteurs pour décoller et atterrir. Elle est située à proximité du seuil de la piste 25L de l’aérodrome de Montaigu - Saint-Georges.

L’instructeur se rend compte que l’élève suit une trajectoire convergente avec celle d’un ULM pendulaire en finale derrière lui pour la piste 25L. Craignant que ce dernier ne se rapproche, l’instructeur demande à son élève d’effectuer un virage par la gauche et de se représenter en approche, sans lui en préciser la raison afin de ne pas le perturber. L’élève exécute le virage et simultanément augmente la puissance du moteur. Le paramoteur part en virage engagé et entre en collision avec le sol.

2 - Renseignements complémentaires

2.1 Informations sur le virage engagé

Le virage engagé survient lorsqu’un pilote vire à forte inclinaison sans ajuster l’incidence pour augmenter la portance, plaçant ainsi l’aéronef sur une trajectoire en spirale descendante avec une forte augmentation de la vitesse. Ceci peut se produire quand l’attention du pilote est portée sur un autre objectif ou dégradée par un facteur extérieur stressant.

La manœuvre de sortie d’un virage engagé en ULM paramoteur peut être enseignée après l’obtention du brevet, au cours d’une formation complémentaire dans un environnement adapté.

L’élève indique que son action pour virer lors de l’accident a été trop ample et trop prolongée.

2.2 Description de l’aérodrome

En application de l’article 28 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, un transfert de compétences et de patrimoine portant sur l’aérodrome de Montaigu - Saint-Georges a été réalisé le 19 décembre 2006 entre le ministre chargé de l’Aviation civile et la Communauté de Communes Terre de Montaigu (CCTM). A cette date, la Direction Générale de l’Aviation Civile (DGAC) a transféré la propriété de l’aérodrome et les responsabilités inhérentes. La CCTM n’a pas à ce jour délégué l’exploitation de l’aérodrome.

L’aérodrome de Montaigu - Saint-Georges est ouvert à la Circulation Aérienne Publique (CAP). Il dispose de deux pistes 07/25 non revêtues parallèles juxtaposées. La piste nord est réservée à l’activité des planeurs ; celle du sud aux autres aéronefs.

Il n’est pas contrôlé et la radio n’y est pas obligatoire. Les échanges de radiocom-munication se font sur la fréquence A/A(1) 123.5 MHz.

La carte VAC précise dans le paragraphe sur les conditions générales d’utilisation de l’aérodrome : « Utilisation simultanée des pistes interdites. Simultanéité des mouvements ULM/avions ou ULM/planeurs interdite». Le paragraphe « Activités diverses » mentionne « Activité paramoteur importante ».

La zone utilisée par les ULM paramoteur n’est pas mentionnée sur la carte.

Le rapport de contrôle des conditions d’homologation et des procédures d’exploitation des aérodromes (CHEA) de l’aérodrome de Montaigu - Saint-Georges, effectué le 28 septembre 2011 par la DSAC-O, ne mentionne pas non plus l’existence de la zone utilisée par les ULM paramoteur.

2.3 Organisme de formation au pilotage d’ULM paramoteur

L’école de pilotage est implantée sur l’aérodrome de Montaigu. Selon la Fédération Française d’ULM, cette école est le centre le plus important de formation de pilotes d’ULM paramoteur de France. Depuis 2007, une cinquantaine de pilotes sont formés chaque année.

Les organismes de formation de pilotes d’ULM ne sont pas approuvés ou certifiés par la DGAC. Celle-ci n’a donc pas d’obligation de surveillance. Cependant, dans le cadre de ses prérogatives relatives notamment à la sécurité et à la sûreté, l’Etat peut diligenter, lorsqu’il l’estime nécessaire, une inspection de l’aérodrome. La DGAC dans le cadre de sa mission de surveillance, à l’occasion d’une visite de cet organisme de formation en avril 2010, a indiqué « qu’un paramoteur est un aéronef et qu’à ce titre, il doit utiliser une piste et que si celle-ci est fermée, il ne peut décoller ni atterrir ».

2.4 Utilisation de la radio

La fréquence A/A 123.5 MHz est partagée par l’ensemble des usagers. Elle n’est pas utilisée comme moyen de communication entre les instructeurs et leurs élèves-pilotes paramoteur car elle risquerait d’être saturée. Elle n’est pas utilisée par les autres pilotes de paramoteur, l’emploi de la radio n’étant pas obligatoire sur cet aérodrome.

L’usage d’une radio portable entre l’élève et son instructeur est une pratique courante pour la formation sur paramoteur. La gamme de fréquence utilisée se situe hors des bandes dédiées à l’aéronautique. L’instructeur garde un contact visuel permanent avec son élève.

2.5 Aspects réglementaires

L’arrêté du 10 juillet 2006 relatif aux caractéristiques techniques de certains aérodromes terrestres utilisés par les aéronefs à voilure fixe est le texte de référence réglementaire en vigueur.

L’arrêté ne prend pas en compte les spécificités d’aéronefs particuliers comme les ULM paramoteur. C’est pourquoi la DGAC et les opérateurs se réfèrent à l’Instruction Technique sur les Aérodromes Civils ou ITAC 13 qui rassemble des recommandations techniques. Ainsi, le chapitre 4 (Aérodromes à caractéristiques spéciales, - Plateformes destinées aux ULM) indique :

« La réglementation permet aux ULM d’atterrir ou de décoller :

a - soit sur des aérodromes régulièrement établis,

b - soit sur des plateformes spécialement aménagées pour les recevoir à titre permanent ou pour accueillir une activité rémunérée,

c - soit sur des plateformes utilisées à titre occasionnel à des fins de vols privés ou d’épandage agricole.»

L’ITAC 13 prévoit la création d’une plateforme de classe UB(2) à l’usage exclusif des parapentes motorisés appelés « paramoteurs » pour une utilisation permanente ou pour une activité rémunérée.

2.6 Contexte opérationnel

En plus des contraintes réglementaires, les contraintes d’environnement sur l’emprise de l’aérodrome de Montaigu ne permettent pas de créer une plateforme de classe UB, indépendante des pistes. L’espace disponible n’est pas suffisant.

Un instructeur de planeur indique qu’en début de saison, les planeurs utilisent la piste sud pour laisser l’herbe pousser sur la piste nord. Par ailleurs, il n’est pas rare de voir un certain nombre de promeneurs sur les pistes, l’aérodrome n’étant pas clos.

En fin de semaine ou en période estivale, cet aérodrome accueille beaucoup d’aéronefs évoluant à des vitesses très diverses, certains non équipés de radio.

3 - Enseignements et conclusion

La zone de décollage et d’atterrissage d’ULM paramoteurs est omnidirectionnelle compte tenu de la sensibilité au vent de ces aéronefs. Sa présence à proximité immédiate d’une piste bidirectionnelle augmente les risques de trajectoires convergentes. Le fait qu’elle ne soit pas mentionnée sur la carte VAC peut aussi surprendre des usagers peu familiers de l’aérodrome. Par ailleurs, la présence d’aéronefs lents, souvent pilotés par des élèves et donc seuls à bord, dans un espace restreint où volent des aéronefs plus rapides augmente les risques de rapprochements dangereux. Enfin, l’impossibilité pratique d’utiliser une fréquence radio commune empêche l’auto-information pourtant souhaitable compte tenu de la diversité des activités sur la plateforme.

Dans le cas de l’accident, l’intervention de l’instructeur au sol a probablement surpris et perturbé l’élève seul à bord dont les actions inadéquates ont provoqué une mise en virage engagé.

4 - Recommandation

Rappel : conformément aux dispositions de l’article 17.3 du règlement n° 996/2010 du Parlement européen et du Conseil du 20 octobre 2010 sur les enquêtes et la prévention des accidents et des incidents dans l’aviation civile, une recommandation de sécurité ne constitue en aucun cas une présomption de faute ou de responsabilité dans un accident, un incident grave ou un incident. Les destinataires des recommandations de sécurité rendent compte à l’autorité responsable des enquêtes de sécurité qui les a émises, des mesures prises ou à l’étude pour assurer leur mise en œuvre, dans les conditions prévues par l’article 18 du règlement précité.

Risques engendrés par la proximité de différentes activités aéronautiques

L’enquête a montré que la présence, sur l’aérodrome de Montaigu, d’une zone de décollage et d’atterrissage utilisée pour la formation de pilotes d’ULM paramoteur générait des risques de collision avec d’autres aéronefs plus rapides du fait de sa proximité avec la piste. Ceci a contribué à la perte de contrôle, puis à la collision avec le sol d’un ULM paramoteur lors de l’exécution par un élève-pilote d’une manœuvre de séparation à basse hauteur.

En conséquence le BEA recommande que :

la Communauté de Communes Terres de Montaigu en concertation avec la Direction de la Sécurité de l’Aviation Civile (DSAC) locale et les usagers de la plateforme étudie des solutions pour diminuer les risques engendrés par la proximité des différentes activités aéronautiques sur l’aérodrome de Montaigu. [Recommandation FRAN-2014-011]

(1)Radiocom-munication Air/Air en auto information.

(2)La plateforme de classe UB est une surface plane de pente inférieure à 4 % et de forme circulaire de 30 m de rayon permettant l’utilisation omnidirectionnelle qu’exige la sensibilité au vent des ULM paramoteur. Au-delà de ce cercle, une surface de dégagement sur une distance de 200 m sous un angle de 6 % doit être établie.