ULM - 2021
Au-delà de l’obligation règlementaire européenne d’ouvrir une enquête pour tout accident impliquant un aéronef certifié, la politique du BEA depuis 2015 est de conduire également des enquêtes sur les accidents d’ULM lors desquels des personnes sont mortellement blessées. Ce bilan est ainsi limité aux accidents mortels.
En 2021, le BEA a publié 17 rapports relatifs à des accidents mortels d’ULM dont la répartition par classe est la suivante :
- 1 événement concernant un paramoteur (classe 1) ; 1 personne décédée
- 2 événements concernant des pendulaires (classe 2) ; 2 personnes décédées
- 10 événements concernant des ULM multiaxes (classe 3) ; 12 personnes décédées
- 3 événements concernant des autogires (classe 4) ; 3 personnes décédées
- 1 événement concernant un hélicoptère ultraléger (classe 6) ; 1 personne décédée
On dénombre pour l’ensemble de ces accidents un total de 19 personnes décédées.
Six thèmes ressortent plus particulièrement de ces rapports.
1. Expérience insuffisante
L’expérience insuffisante du pilote au regard du contexte du vol est fréquemment identifiée comme un facteur contributif aux accidents quelle que soit la catégorie d'aéronef. Cette problématique a notamment été abordée dans le rapport sur l’accident du 32DH survenu le 31 août 2020 à Condom Valence-sur-Baïse. Dans ce rapport, il est rappelé l’initiative Remise en Vol (REV) de la Fédération française d’ULM (FFPLUM) qui a pour objectif de favoriser, sur une démarche volontaire, la rencontre entre pilotes et instructeurs, notamment après une période d’inactivité. Les vols avec un instructeur permettent d’aborder des situations normales mais aussi inusuelles afin de mieux les appréhender et de ne pas perdre des automatismes acquis lors de la formation initiale. Dans l’accident du 83AGL survenu le 6 août 2020 à Cruis, le pilote a perdu le contrôle de son ULM lors d’une interruption de l’atterrissage sur une plate-forme assimilable à une altisurface. L’absence de formation du pilote au vol en montagne et plus spécifiquement à l’atterrissage sur terrain en pente, a pu contribuer à la décision inappropriée de redécoller. Le Pôle National Vol Montagne (PNVM) de la FFPLUM propose aux pilotes d’ULM des formations au pilotage en montagne.
Cette thématique est mentionnée dans quatre autres rapports publiés en 2021 :
- Faible expérience récente
- Faible expérience en solo après l’obtention du brevet ULM ou de la qualification de classe
On dénombre pour les événements cités sept personnes décédées.
2. Aspects médicaux
Les pilotes d’ULM doivent évaluer eux-mêmes leur aptitude médicale à piloter. Ainsi certains d’entre eux peuvent être dépourvus d’interlocuteur susceptible de les aider à en surveiller l’évolution. En pratique, tous les pilotes, y compris d’ULM, peuvent demander conseil à un médecin, aéronautique de préférence. Le questionnaire de santé, dont les pilotes affiliés à la FFPLUM doivent prendre connaissance annuellement, est un outil pour aider ces derniers à évaluer le besoin de consulter un médecin. En outre, l’édito du BSV n°56 de la FFPLUM présente la checklist personnelle « MAFORME » qui permet d’évaluer avant chaque vol sa propre capacité à voler.
Dans deux rapports, l’incapacité en vol du pilote a été retenu comme facteur contributif probable de l’accident :
- 59DPK survenu le 28 décembre 2019 à Valenciennes-Denain
- 03AEN survenu le 11 septembre 2019 à Itxassou
Dans deux autres rapports, bien que la contribution à l’accident de l’état de santé des pilotes ne soit pas avérée, l’état pathologique de ces derniers conduit à s’interroger sur leur aptitude à effectuer le vol en sécurité.
On dénombre pour les événements cités cinq personnes décédées.
3. Prises de risques et manœuvres non essentielles au déroulement du vol
Cette problématique de sécurité a été fréquemment soulevée dans des enquêtes de sécurité sur des accidents mortels, toutes catégories d’aéronefs confondues. Le BEA a plusieurs fois évoqué ce thème notamment dans sa contribution au rapport sur la sécurité aérienne 2018 publié par la DGAC et dans le bilan thématique 2020 sur les avions légers.
Dans deux accidents, une forme de démonstration vis-à-vis de tiers a pu être recherchée par le pilote :
- 84FK survenu le 15 août 2020 à Saint-Martin-de-Londres
- 49ABZ survenu le 31 août 2020 à Saumur - Saint-Florent
Événement similaire publié en 2021 : 59DAE survenu le 22 mai 2020 à la Ferté-Bernard.
On dénombre pour les événements cités quatre personnes décédées.
4. Parachute de secours
Plusieurs rapports ont mis en évidence un déclenchement tardif ou une non-utilisation dans un contexte où ce dispositif de secours aurait pu atténuer les conséquences de l’accident.
On peut citer le rapport sur l’accident du 13LZ survenu le 7 mai 2019 à Saint-Antonin-sur-Bayon. Le pilote, probablement confronté à des difficultés de manœuvrabilité liées à une défaillance de la commande de lacet, n’a pas activé le parachute de secours et l’ULM est entré en collision avec le relief.
Lors de l’accident du 59DAE survenu le 22 mai 2020 à la Ferté-Bernard, le pilote a été confronté à une rupture en vol de l’empennage horizontal. Il a déclenché le parachute de secours à une hauteur insuffisante et l’ULM est entré en collision avec le sol.
On note dans l’accident du 57AYE survenu le 7 octobre 2019 à Jumeauville, que le pilote n’avait pas retiré la goupille de sécurité sur la poignée du parachute de secours. Dans ces conditions, confronté à une situation d’urgence, il était peu probable que le pilote pense à utiliser le parachute.
On dénombre pour les événements cités quatre personnes décédées.
Par ailleurs, sur la période 2019-2021, le BEA a été informé de trois événements qui n’ont pas eu de conséquences mortelles, au cours desquels le parachute a été déclenché. Ils n’ont pas donné lieu à une enquête du BEA.
5. Entretien des aéronefs
Lors de l’accident du 13LZ survenu le 7 mai 2019 à Saint-Antonin-sur-Bayon, il est possible que la rupture en vol d’un toron sur un des câbles de direction ait pu avoir des conséquences sur la liberté de la commande de direction, en entravant le passage d’un câble au niveau d’une poulie. L’absence de vérification de l’état des câbles lors des visites 25 et 100 heures n’a pas permis à l’exploitant de prendre conscience de l’état d’endommagement important d’un des deux câbles de direction. Les endommagements observés sur un câble métallique peuvent parfois sembler anodins, mais leurs conséquences peuvent potentiellement être importantes.
Dans l’accident du 59DAE survenu le 22 mai 2020 à la Ferté-Bernard, la possible présence d’un jeu introduit sur la chaîne de commande du compensateur de profondeur lors de la modification du système d’admission du moteur par le pilote a pu générer un phénomène de couplage aéroélastique (« flutter ») sur la gouverne du compensateur.
Deux personnes sont décédées dans ces accidents.
Ce thème est également abordé dans le bilan thématique 2020 sur les avions légers.
6. Décrochage en multiaxe
La perte de contrôle (voir le rapport sur la sécurité aérienne de 2017 publié par la DGAC, Pertes de contrôle en vol, en aviation légère, page 50) constitue classiquement la catégorie d’occurrence la plus meurtrière en aviation légère. Il est cependant difficile d’en dégager des enseignements universels car cette catégorie d’occurrence recouvre des séquences d’événements très diverses dans des circonstances très variées. Dans les rapports publiés en 2021, quatre situations relatives à un décrochage en multiaxe ont été identifiées. Aucun de ces ULM n’était équipé d’avertisseur de décrochage ; la règlementation ne l’impose pas. En l’absence de certification il est difficile de déterminer si des signes annonciateurs du décrochage, tels que le buffeting, étaient perceptibles et auraient permis au pilote de prendre conscience de l’imminence de la perte de contrôle. Dans le rapport sur l’accident du 57AYE survenu le 7 octobre 2019 à Jumeauville, il est notamment indiqué qu’ « en l’absence d’avertisseur de décrochage, il peut s’avérer difficile de percevoir le décrochage, en particulier dans une situation inhabituelle pouvant générer un stress, et avec un ULM présentant peu de signes aérodynamiques annonciateurs du décrochage. Le respect de la masse maximale au décollage et du centrage permet d’évoluer dans un domaine de vol connu, défini par le constructeur. »
Autres situations de décrochage ayant donné lieu à des rapports publiés en 2021 :
- 32DH survenu le 31 août 2020 à Condom Valence-sur-Baïse
- 83AGL survenu le 6 août 2020 à Cruis
- 03AEN survenu le 11 septembre 2019 à Itxassou
On dénombre pour les événements cités six personnes décédées.
Autres rapports publiés en 2021
Multiaxe 64ADG survenu le 30 septembre 2020 à Itxassou : rapprochement avec des vautours, manœuvre d’évitement, perte de contrôle, collision avec le relief, incendie, en remorquage.
Multiaxes 57YM et 75WQ survenu le 1er septembre 2018 à Valencisse : collision en vol de navigation avec un autre ULM, perte de contrôle, collision avec le sol.
Paramoteur 82OT survenu le 5 juillet 2020 à Pommevic : perte de contrôle en montée initiale, collision avec une ligne électrique, en instruction solo.
Autogire 31LI survenu le 5 juillet 2020 à Sos : heurt de la gouverne de direction par le rotor principal, perte de contrôle en vol, collision avec le sol.
Hélicoptère ultra-léger 83ARU survenu le 30 novembre 2019 à Gréoux-les-Bains : perte des portes en vol, perte de contrôle, collision avec le sol, incendie.
Autogire 48BU survenu le 18 janvier 2021 à Valmeinier : collision avec le sol.