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Accident de l'Airbus A310 immatriculé 7O-ADJ exploité par Yemenia Airways survenu le 29/06/2009 en mer au large de Moroni [enquête menée par AIB - Comores]

Décrochage lors d'une approche interrompue, collision avec la surface de l'eau

Autorité en charge

Comores - AIB

Vol Sanaa (Yemen) - Moroni (Union des Comores)

Le lundi 29 juin 2009, l'Airbus A310-324 immatriculé 7O-ADJ exploité par Yemenia effectue le vol régulier IY626 entre l'aérodrome de Sanaa (République du Yémen) et Aéroport International Moroni Prince Saïd Ibrahim (Union des Comores). L'aérodrome de dégagement choisi est Dar es Salam (Tanzanie).

L'équipage est composé d'un commandant de bord, probablement pilote en fonction d'un copilote et de neuf navigants.

 

A 18 h 54, l'avion décolle avec vingt-quatre minutes de retard sur l'horaire prévu en raison d'une pression d'air générée par l'APU insuffisante, nécessitant le recours à un groupe de parc pour démarrer les moteurs.

 

A 22 h, l'équipage contacte l'approche de Moroni et s'annonce au FL350 avec une heure estimée de survol du point de report KINAN à 22 h 29 et un atterrissage à 22 h 52. Le contrôleur accuse réception et fournit les dernières informations météorologiques observées sur l'aérodrome : vent 190 ° / 15 kt, visibilité 10 km, nuages rares à 2 000 ft, température 24 °C, température du point de rosée 17 °C, QNH 1018 hPa.

 

A 22 h 25, l'équipage est autorisé à descendre au FL100 pour une arrivée KINAN 1V suivie d'une approche VOR DME ILS piste 02.

 

A 22 h 35, à 25 NM du VOR-DME HAI, l'équipage est autorisé à descendre à 8 000 ft QNH.

 

A 22 h 39, l'équipage est autorisé à poursuivre vers 3 000 ft, et reçoit l'instruction de rappeler établi sur le localizer pour une MVI piste 20. Il demande de confirmer si les feux à éclats sont allumés en piste 20. Le contrôleur répond par la négative. L'équipage indique qu'il parle des «flashing lights runway 20 beacon ». Le contrôleur répond qu'ils ne fonctionnent pas.

 

L'équipage demande alors d'augmenter au maximum l'intensité du balisage de piste. L'avion est établi sur l'axe d'approche (localizer) et intercepte le plan de descente (glide slope) à 3 000 ft à 22h 47min 38 s.

 

Pendant la descente sur l'ILS, plusieurs messages concernant l'intensité et la direction du vent aux seuils des pistes 02 et 20 sont échangés entre l'équipage et le contrôleur. Le dernier vent donné par le contrôleur pour la piste 20 est du 200° entre 12 et 25 kt.

 

A 22 h 49 min 45 s, à 1 390 ft, l'avion quitte le localizer sous pilote automatique vers le début de la branche vent arrière de la MVI, après le point publié. Le train est en position « sorti », les becs/volets sont à 15°/15°.

 

A 22 h 50 min 42 s, le pilote automatique est déconnecté.

 

A 22 h 50 min 49 s, l'équipage annonce qu'il est établi en vent arrière. Le contrôleur lui demande de rappeler en finale. L'avion est alors au cap 320° en virage à droite et à une hauteur radiosonde de 700 ft.

 

A 22 h 50 min 54 s, les alarmes GPWS SINK RATE puis PULL UP sont générées. La hauteur radiosonde est de 548 ft, le taux de descente est d'environ 2 000 ft/min. L'avion est en virage à droite, à 27° d'inclinaison.

 

Entre 22 h 51 min 09 s et 22 h 51 min 29 s, le GPWS génère successivement les messages FOUR HUNDRED, THREE HUNDRED, puis TOO LOW TERRAIN.

 

A 22 h 51 min 31 s, la hauteur radiosonde atteint une valeur minimale de 161 ft, puis augmente à nouveau.

 

A 22 h 51 min 42 s, l'équipage rentre le train d'atterrissage. L'avion est au cap 017°.

 

A 22 h 51 min 47 s, l'équipage indique au contrôleur qu'il rappellera en longue finale.

 

A 22 h 51 min 57 s, l'alarme sonore L/G NOT DOWN se déclenche pendant 6 secondes.

 

A 22 h 52 min 10 s, le pilote automatique est à nouveau connecté. Simultanément, la commande des becs/volets est positionnée sur 15°/0°.

 

A 22 h 52 min 28 s, la commande des becs/volets est positionnée sur 0°/0°.

 

A 22 h 52 min 50 s, l'alarme sonore L/G NOT DOWN se déclenche pendant 1,3 seconde.

 

A 22 h 52 min 51 s, le pilote automatique est à nouveau déconnecté. L'assiette et l'incidence augmentent.

 

A 22 h 52 min 56 s, la protection « Alpha floor » se déclenche. La poussée des moteurs augmente vers TOGA, puis conserve cette valeur jusqu'à la fin de l'enregistrement.

 

A 22 h 52 min 57 s, un bruit similaire à du « buffet » est enregistré dans le CVR.

 

A partir de 22 h 52 min 59 s, et pendant 40 secondes environ :

- l'incidence varie de 14,6° à 23,7°,

- l'inclinaison varie entre 37,6° à droite et 39,7 ° à gauche,

l'altitude augmente jusqu'à un palier d'environ 1 000 ft.

 

A 22 h 53 min 40 s, l'alarme sonore de décrochage se déclenche. L'altitude diminue rapidement.

 

L'avion heurte la surface de la mer vers 22 h 53 min 55 s.

A partir de 22 h 54 min 21 s, le contrôleur appelle à plusieurs reprises l'équipage du vol IY626, sans réponse puis déclenche l'alerte. 

Conclusion 

L'accident est dû à des actions inadaptées de l'équipage sur les commandes de vol ayant amené l'avion dans une situation de décrochage qui n'a pas été récupérée. Ces actions ont été consécutives à une manoeuvre à vue non stabilisée, au cours de laquelle de nombreuses et différentes alarmes relatives à la proximité du sol, à la configuration de l'avion et à l'approche du décrochage se sont déclenchées. L'équipage dont l'attention était focalisée sur la gestion de la trajectoire de l'avion et le repérage de la piste, n'a probablement pas eu les ressources mentales suffisamment disponibles, dans cette situation de stress, pour réagir de façon adéquate aux différentes alarmes.

Ont contribué à l'accident

- Les conditions météorologiques présentes sur l'aéroport (des rafales de vent avoisinant les 30 kts).

- L'absence d'entrainement ou le briefing de l'équipage avant l'exécution de vol sur Moroni conformément au manuel d'exploitation de la compagnie Yemenia, au regard de l'hésitation du pilote à exécuter la MVI(aucun des documents remis à l'enquête n'illustre ces formations).

- La non application de la procédure consécutive à l'alarme PULL UP par l'équipage .

 

  • Information du 01/07/2013

    La compagnie Yemenia assurait les 29 et 30 juin 2009 la liaison Paris-Marseille-Sanaa (Yémen)-Moroni (Comores). A ce titre, l'Airbus A310-324 immatriculé 7O-ADJ effectuait le vol IY626 entre Sanaa et Moroni. Il y avait à bord 142 passagers et 11 membres d'équipage.

    Lors d’une manœuvre à vue imposée (MVI) effectuée de nuit pour un atterrissage en piste 20 (face au sud), le contrôleur de Moroni a perdu le contact radio avec l'équipageentre 22 h 53 et 22 h 55 (temps universel - UTC). L'avion a heurté la surface de la mer dans le nord-ouest de l'ile, à environ 18 km de l'aérodrome, en dehors de la trajectoire correspondant à la procédure d'approche. 

    Les 142 passagers étaient soit de nationalité française soit de nationalité comorienne résidant en France. Seule une passagère de 13 ans a survécu à l'accident.

    Deux minutes après le dernier contact, le contrôleur a appelé quatre fois l’avion sans obtenir de réponse. Il a immédiatement déclenché la phase d’alerte. Les autorités aussitôt informées ont mis en place deux cellules de crise à l’aéroport : une cellule politique et une cellule technique, lesquelles ont initié les premières opérations de recherche et de sauvetage.

    Organisation de l’enquête

    En application des dispositions de l’annexe 13 à la Convention relative à l’Aviation Civile Internationale, une Commission d’Enquête de l’Union des Comores a été constituée le 2 juillet 2009.

    Cette commission était composée :

    - de l’équipe d’enquête comorienne en charge de l’enquête de sécurité (Etat d’occurrence) ;

    - du BEA et des conseillers techniques d’Airbus (Etat de conception) ;

    - des autorités de l’aviation civile du Yemen (CAMA) et des conseillers de la compagnie aérienne Yemenia (Etat d’exploitation) ;

    - du NTSB et des conseillers techniques de Pratt & Whitney (Etat de construction des moteurs) ;

    - et de l’ASECNA (Agence pour la Sécurité de la Navigation Aérienne en Afrique et à Madagascar).

    La Commission a constitué des groupes de travail dans les domaines suivants : Opérations aériennes, Maintenance, Recherches en mer, Enregistreurs et Facteurs Humains.

    Recherches sous-marines

    Immédiatement après l'accident, des moyens français et étrangers se sont rendus sur place pour les opérations de recherche et sauvetage, ce qui a permis de repérer le signal émis par les balises acoustiques des enregistreurs de vol. Un navire a été affrété par le BEA, et les recherches sous-marines se sont déroulées du 20 août 2009.au 14 septembre 2009. Au cours de cette période, une soixantaine de corps ont été remontés et remis à la justice comorienne.

    Les 28 et 29 août 2009, les enregistreurs de vol ont été récupérés à une profondeur de 1 200 m. Des éléments de l’avion ont ensuite été récupérés.

    L'ensemble des recherches menées par la France a coûté près de 3M€.

    Lecture des enregistreurs

    A la demande des autorités comoriennes les opérations de lecture des enregistreurs de vol ont été effectuées au BEA, dès leur arrivée, le 31 août 2009. En raison de l'endommagement des cartes mémoire, la récupération des données a nécessité deux semaines de travail.

    Néanmoins, l’intégralité des données du FDR (Flight Data Recorder, enregistreur de paramètres de l’avion) et 38 des quarante mémoires du CVR (Cockpit Voice Recorder, enregistreur phonique) ont pu être lues.

    Cette lecture a été faite en présence de l'ensemble des membres de la commission d'enquête et d'un représentant de la société Honeywell, constructeur de l'enregistreur.

    A partir de la lecture des enregistreurs, le BEA a remis à l'enquêteur désigné comorien un document qui fait le point de ses travaux.

    Une seconde opération de lecture du CVR a été effectuée dans les locaux de Honeywell à Seattle, du 18 au 22 octobre 2010, en présence des membres de la commission d’enquête. Sur les deux mémoires manquantes du CVR, une a pu être lue.

    Le 25 juin 2011, la commission d’enquête a publié un rapport d’étape.

    Dans une lettre adressée au président de la Commission d’enquête le 5 juillet 2011, le directeur du BEA a fait part de ses observations, regrettant l’absence de référence aux données relatives aux enregistreurs de vol dans ce rapport. 

    Deux ans plus tard, le 25 juin 2013, le rapport final d’enquête a été publié à Moroni au cours d’une cérémonie qui a réuni des Officiels de l’Union des Comores et des représentants des familles comoriennes des victimes de l’accident. L’ambassadeur de France et deux membres du BEA ont assisté à cette cérémonie.

    Rapport final (incluant les annexes 1 à 7), 25 juin 2013


    Liste des annexes :


    Annexe 1 : Renseignements complémentaires sur les caractéristiques de l’avion


    Annexe 2 : Carte d’approche VOR/DME piste 02 et procédure d’arrivée (AIP)


    Annexe 3 : Manœuvre à vue imposée piste 20 (carte Jeppesen)


    Annexe 4 : Transcription des radiocommunications du contrôle de Moroni


    Annexe 5 : Courbe FDR


    Annexe 6 : Transcription du CVR


    Annexe 7 : Localisation des balises de détection sous-marines et bathymétrie


    Annexe 8 : correspondances


    Annexe 9 : commentaires du Yemen

    Le rapport final peut être aussi consulté sur le site de l’ANACM

    Rapport d’étape, 25 juin 2011


    Information et communiqués 

    Lettre du Directeur du BEA adressée au Président de la Commission d'enquête de l'Union des Comores, 5 juillet 2011

    Point sur la participation du BEA à l'enquête dirigée par les autorités comoriennes, 30 juin 2010

    Communiqué de presse diffusé le 5 juillet 2009

    Communiqué de presse diffusé le 30 juin 2009

  • Communiqué de presse du 05/07/2009

    Accident survenu le 30 juin en approche de l'aérodrome de Moroni (Comores)

    Le BEA confirme que le signal des deux balises acoustiques a été repéré ce matin dans le cadre des recherches sous-marines entreprises pour localiser les enregistreurs de bord du vol IY 626.

  • Communiqué de presse du 30/06/2009

    Accident survenu au cours de l'approche de l'aérodrome de Moroni (Comores) dans la nuit du 29 au 30 juin.

    Le BEA a été informé qu'un Airbus A310-300, immatriculé 7O-ADJ, exploité par la compagnie Yemenia, vol IY626, assurant la liaison Sanaa (Yemen) - Moroni (Comores) s'est abîmé en mer au cours de son approche de l'aérodrome de Moroni (Comores) à 1 h 50, heure locale.

    Le BEA envoie une équipe d'enquêteurs accompagnée de spécialistes d'Airbus.

  • Information du 30/06/2009

    Point sur la participation du BEA à l'enquête de sécurité dirigée par les autorités comoriennes, à la suite de l'accident de l'A 310, vol IY 626, survenu à Moroni (Comores) dans la nuit du 29 au 30 juin 2009.

    1. Rappel des faits

    La compagnie Yemenia assurait les 29 et 30 juin 2009 la liaison Paris-Marseille-Sanaa (Yémen)-Moroni (Comores). A ce titre, l'Airbus A310-300 immatriculé 7O-ADJ effectuait le vol IY 626 entre Sanaa et Moroni. Il y avait à bord 142 passagers et 11 membres d'équipage. Lors de l'approche effectuée de nuit en manœuvre à vue imposée (MVI) pour un atterrissage en piste 20 (face au sud), le contrôleur de Moroni a perdu le contact radio avec l'équipage à 22 h 55 (temps universel). L'avion a heurté la surface de la mer dans le nord-ouest de l'ile, à environ 18 km de l'aérodrome, en dehors de la trajectoire correspondant à la procédure d'approche.

    Sur les 152 victimes, 62 étaient de nationalité française et 43 victimes étaient de nationalité comorienne et résidaient en France. Seule une passagère de 13 ans a survécu à l'accident.

    2. Le cadre de l'enquête de sécurité

    Conformément aux règles internationales (Convention de Chicago et son Annexe 13), les Comores ont ouvert une enquête de sécurité à laquelle participent :

    • le Yémen (État d'immatriculation et d'exploitation de l'avion) ;
    • la France (État de conception et de construction de l'avion) ;
    • et les Etats-Unis (État de construction des moteurs de l'avion).

    C'est le BEA qui intervient au nom de la France.

    La collecte des faits se fait dans le cadre de la commission d'enquête mise en place par le Gouvernement comorien.

    Conformément aux règles internationales, seules les autorités chargées de l'enquête sont autorisées à communiquer sur son déroulement. Ainsi, le BEA n'étant pas responsable de l'enquête, il n'est pas en mesure de publier la moindre information sur ses avancées.

    Par ailleurs, et parallèlement à l'enquête technique menée par les Comores, une enquête judiciaire a été ouverte par la justice française dans le cadre de commissions rogatoires internationales.

    3. Les recherches de l'épave et des enregistreurs

    Immédiatement après l'accident, des moyens français et étrangers se sont rendus sur place pour les opérations de recherche et sauvetage. Les enquêteurs du BEA ont pu rapidement repérer les balises acoustiques des enregistreurs de bord,  à environ 1200 mètres de profondeur. Un navire a été affrété par le BEA, et les recherches sous-marines, qui ont duré environ 2 mois, ont permis, de localiser les restes de l'avion. Les enregistreurs de vol et divers éléments de l'avion ont été récupérés. Une soixantaine de corps ont été remontés et remis à la justice comorienne.

    L'ensemble des recherches menées par la France a coûté près de 3M€.

    4. La lecture des enregistreurs

    Les enregistreurs ont été récupérés le 29 août 2009 et, à la demande des autorités comoriennes, immédiatement transportés au BEA. En raison de l'endommagement des cartes mémoire, la récupération des données a nécessité deux semaines de travail.

    Néanmoins, l'essentiel des informations contenues dans les deux enregistreurs (l'un pour les paramètres de l'avion et l'autre pour les conversations en cabine de pilotage) ont pu être lues. Cette lecture a été faite en présence de l'ensemble des membres de la commission d'enquête internationale, et d'un représentant de la société Honeywell, constructeur de l'enregistreur. Elle a permis, du point de vue du BEA, de connaître les circonstances qui ont conduit à l'accident, sans toutefois en déterminer les causes, ce que seule la poursuite de l'enquête pourra faire. A partir de la lecture des enregistreurs, le BEA a remis à l'enquêteur désigné comorien un document qui fait le point de ses travaux.

    5. La poursuite de l'enquête

    Le BEA continuera à coopérer avec les autorités comoriennes chargées de l'enquête en leur apportant son appui technique, comme il l'a fait jusqu'ici, pour faire en sorte que ce type d'accident ne se reproduise plus.