Accéder au contenu principal

Ecart de trajectoire vertical en approche ILS avec le pilote automatique engagé

Ecart de trajectoire vertical en approche ILS avec le pilote automatique engagé

Autorité en charge

France - BEA

Progression de l'enquête Cloturée
Progress: 100%

Déroulement du vol

Note : dans toute cette section et sauf indication contraire, les hauteurs sont notées AGL. Les valeurs d'altitude sont celles du paramètre enregistré corrigées du QNH et sont notées AMSL.

Les procédures LVP sont en vigueur à Paris Charles de Gaulle. Etabli sur l'ILS piste 08R(1) en approche de précision CAT III A(2), l'équipage constate à partir de 1 700 ft AMSL un fonctionnement par intermittence du radioaltimètre 1. L'équipage interrompt l'approche vers 800 ft AMSL après avoir détecté un message APCH WARN affiché au système de guidage tête haute (HGS) et au PFD. L'origine de ce message est un écart supérieur aux tolérances entre les hauteurs mesurées par les deux radioaltimètres de l'avion.

Une seconde approche CAT III A est effectuée en piste 08R. A environ 1 700 ft AMSL, le radioaltimètre 1 fonctionne à nouveau par intermittence. Vers 1 000 ft AMSL, un message d'alerte MASTER CAUTION, accompagné du message EFIS COMP MON à l'EICAS(3) et du message APCH WARN au HGS se déclenche durant quelques secondes pour les mêmes raisons qu'au cours de la première approche. L'équipage interrompt l'approche environ quinze secondes plus tard, à une altitude d'environ 800 ft AMSL. Les messages d'alerte EFIS COMP MON et APCH WARN se déclenchent à nouveau.

La RVR est suffisante pour effectuer une approche de précision CAT I(4) en piste 08R. En se basant sur le plafond nuageux constaté lors des deux premières approches, l'équipage indique au contrôleur qu'il souhaite faire une approche de CAT I et qu'en cas de nouvelle approche interrompue, il se dérouterait vers l'aérodrome de Lille. Vers 1 700 ft AMSL, le radioaltimètre 1 fonctionne à nouveau par intermittence. Le PA est connecté. A partir de 700 ft AMSL, soit 160 ft au-dessus de la DA et jusqu'à 340 ft AMSL le radioaltimètre 1 ne fournit pas de hauteur. Pendant cette période, l'assiette longitudinale de l'avion commence à osciller. A l'altitude correspondant à la DA, elle est légèrement positive (0,3 degrés à cabrer) puis augmente jusqu'à 1,3 degré à cabrer avant de décroître rapidement jusqu'à une assiette d'environ 7 degrés à piquer vers 100 ft AGL. La déviation G/S est alors d'un point en dessous du plan de descente de l'ILS. Le PF déconnecte le PA dès qu'il constate la diminution d'assiette, vers 120 ft AGL. Il reprend le plan de descente et, en vue de la rampe d'approche, poursuit pour atterrir sans autre difficulté en piste 08R.

Conclusion et recommandations

Rappel : conformément aux dispositions de l'article 17.3 du règlement n° 996/2010 du Parlement européen et du Conseil du 20 octobre 2010 sur les enquêtes et la prévention des accidents et des incidents dans l'aviation civile, une recommandation de sécurité ne constitue en aucun cas une présomption de faute ou de responsabilité dans un accident, un incident grave ou un incident. Les destinataires des recommandations de sécurité rendent compte à l'autorité responsable des enquêtes de sécurité qui les a émises, des mesures prises ou à l'étude pour assurer leur mise en œuvre, dans les conditions prévues par l'article 18 du règlement précité.

Lors de l'événement, la comparaison des valeurs de hauteur issues des deux radioaltimètres affichées sur leurs PFD respectifs a permis au pilote de détecter l'origine du problème au niveau du radioaltimètre 1. Les deux membres d'équipage n'avaient toutefois pas connaissance des conséquences de l'utilisation de ces valeurs erronées par le PA/DV qui, considérant ces hauteurs comme valides, avait tendance à sur-corriger les écarts de trajectoire par rapport au plan de descente de l'ILS. Ayant conservé le PA connecté le plus longtemps possible, le PF, certainement surpris par l'écart de trajectoire, a dû réagir à très faible hauteur pour rattraper le plan de descente.

Fragilité des câbles en maintenance

Il est possible, compte tenu des caractéristiques des câbles coaxiaux, des manipulations pouvant être effectuées pour brancher ces câbles ou de la longueur de câble utilisé (rouleau entre les antennes et l'émetteur-récepteur), qu'un excès de courbure du câble ait provoqué un court-circuit. Les systèmes de radioaltimétrie sont composés de plusieurs éléments distincts (radioaltimètre, câbles, antennes…) qui peuvent être changés et manipulés de manière indépendante, entraînant une éventuelle dégradation des autres éléments du système. Ainsi, des recommandations des constructeurs des avions à l'attention des services d'entretien sur les actions à effectuer en cas d'anomalie détectée provenant d'un système de radioaltimétrie ainsi que sur les opérations d'entretien de ces systèmes permettraient de limiter le nombre d'événements liés à des valeurs erronées de hauteur.

Influence de valeurs erronées de hauteur

Les différents exemples présentés montrent l'importance de l'utilisation des valeurs de hauteurs des radioaltimètres par les systèmes embarqués et les conséquences de valeurs erronées sur leur fonctionnement. La fourniture par les radioaltimètres de telles valeurs est un problème général connu qui concerne les systèmes embarqués de plus en plus complexes de tous les types d'avions. Les exemples montrent également la volonté des constructeurs de limiter les risques associés aux valeurs erronées issues des radioaltimètres.

Dans la plupart des cas, les équipages détectent, soit par eux-mêmes en surveillant leur PFD, soit par avertissement des systèmes, les dysfonctionnements de radioaltimètres. Par contre, les équipages sont souvent amenés à réagir aux événements indésirables résultants de l'utilisation de ces valeurs erronées par les systèmes embarqués, plutôt que de décider et à agir par anticipation. Ceci peut s'expliquer par l'insuffisance de renseignements fournis aux équipages, dans la documentation à leur disposition, durant leur formation mais aussi par les systèmes d'avertissement en vol. Cette carence ne permet pas d'anticiper les conséquences d'erreurs provenant des radioaltimètres.

Les décisions alors prises par les équipages peuvent être inappropriées, surtout en approche où l'estimation en temps réel du risque associé à ces problèmes n'est pas forcément possible. Des compléments d'information sur l'utilisation par les automatismes des hauteurs fournies par les radioaltimètres (documentation équipage, procédures, formation, entraînement…) permettraient aux équipages de mieux appréhender un dysfonctionnement du système de radioaltimétrie.

C'est pourquoi le BEA recommande à l'AESA de s'assurer que :

Recommandation FRAN-2012-008

- les constructeurs d'aéronefs examinent et corrigent quand cela est possible les effets indésirables produits sur les systèmes embarqués par des valeurs de hauteurs erronées fournies par au moins un radioaltimètre ;

Recommandation FRAN-2012-009

- les constructeurs d'aéronefs modifient les manuels d'utilisation des avions en précisant l'exploitation par les systèmes embarqués des informations fournies par les radioaltimètres ainsi que les recommandations ou procédures à suivre pour les équipages en cas de détection d'informations erronées provenant d'au moins un radioaltimètre ;

- Recommandation FRAN-2012-0010

les constructeurs d'aéronefs modifient les procédures d'entretien pouvant avoir des conséquences sur le système de radioaltimétrie afin de prendre en compte les risques de détérioration.

(1)Altitude topographique du seuil de piste 08R : 336 ft.

(2)Approche de précision aux instruments suivie d'un atterrissage avec une DH inférieure à 100 ft et une RVR égale ou supérieure à 200 m.

(3)Engine Indication and Crew Alerting System.

(4)RVR nécessaire de 550 mètres et DH de 200 ft.