Flutter d'ailerons en arrivée, rupture de la commande de roulis, cheval de bois lors de l'atterrissage d'urgence
Flutter d'ailerons en arrivée, rupture de la commande de roulis, cheval de bois lors de l'atterrissage d'urgence
CIRCONSTANCES
Le pilote participe à la compétition régionale Ile-de-France organisée sur l'aérodrome de Buno-Bonnevaux. Il s'agit du cinquième vol de la compétition, qui est une épreuve de vitesse sur secteurs.
Le pilote décolle en remorqué à 13 h 32. Il explique qu'au retour, vers 16 h 50, il s'annonce à 10 km en route directe vers la ligne d'arrivée, située au seuil de la piste 28. Il prévoit de faire un passage au-dessus de la piste 28 pour atterrir ensuite sur la piste 01. Il est à une hauteur de 700 m, au-dessus du plan défini avec une finesse de 25, avec les volets sortis au cran 1 (- 11°). Quelques instants plus tard, il sent qu'il entre dans une ascendance et pousse sur le manche pour ne pas remonter. Il sent alors que « les ailes du planeur battent ». Il sort les aérofreins et constate que le phénomène de battement s'arrête. Il remarque alors que ses actions en roulis sont sans effet. Il ajoute qu'après avoir envisagé d'évacuer le planeur en vol, il constate qu'il parvient à le contrôler en agissant sur les palonniers et la commande de profondeur. Il décide d'atterrir dans un champ situé avant la piste 28. Il sort le train d'atterrissage et positionne les volets sur le cran + 8°. Lors de l'atterrissage, le planeur fait un cheval de bois.
Le phénomène de battement d'aile ressenti par le pilote a été identifié comme étant du flutter d'ailerons. Au sol, il est constaté que l'embout chape de la bielle de liaison entre le pied du manche et le guignol de renvoi de commande des ailerons est rompu. L'examen de l'embout montre qu'il s'est rompu par surcharge en flambage. Les efforts ayant conduit à cette rupture sont compatibles avec une opposition au mouvement des ailerons, c'est-à-dire un manche maintenu fermement lors du phénomène de flutter.
Les water-ballasts contenaient chacun 40 litres d'eau. La masse et le centrage se trouvaient dans les limites définies par le constructeur. Le pilote utilisait un récepteur GPS relié à son PDA ; la précision des données issues de ce système n'étant pas connue, elles n'ont pas pu être exploitées. Le pilote explique que sa vitesse indiquée était d'environ 170 km/h lorsque le phénomène s'est déclenché(1). Les conditions météorologiques étaient favorables à la pratique du vol à voile, de nombreuses ascendances thermiques étaient présentes. La température extérieure était de 32 °C au sol.
Les masses et équilibrages des ailerons et des volets ont été mesurés après l'événement. Ces mesures n'ont pas mis en évidence d'élément ayant pu être à la source du déclenchement du flutter. L'état de la timonerie des ailerons et des volets au moment de l'événement n'a pas pu être déterminé avec précision, les jeux constatés après pouvant être une conséquence du flutter.
Le certificat de navigabilité de type de l'ASW 20 F a été délivré en novembre 1978 à la SA Centrair, devenue Société Nouvelle Centrair en 1988. L'ASW 20 F est technologiquement identique au planeur ASW 20 fabriqué en Allemagne par la société Schleicher.
En juin 1987, la société Schleicher avait émis un bulletin de service (Technical note n° 31) donnant des mesures préventives contre le flutter d'ailerons. Deux cas de flutter avaient été constatés, et les facteurs suivants identifiés comme déclencheurs du phénomène :
- volets sur le cran 1 ;
- vitesse(2) supérieure à 200 - 210 km/h ;
- ruban d'étanchéité (servant à obturer l'interstice entre l'intrados de l'aile et les volets et ailerons) absent.
Dans ces conditions, l'air peut circuler par l'interstice entre l'intrados et l'extrados de l'aile, et ainsi provoquer un phénomène de flutter d'ailerons.
Centrair a repris le bulletin de service Schleicher. Il a été rendu obligatoire par la CN 87-139(A) de la DGAC. Le BS prévoit la vérification du bon colmatage des fentes d'ailerons.
Le planeur était entretenu par son propriétaire. Les visites réalisées étaient conformes au programme d'entretien approuvé. Le propriétaire avait remplacé les rubans d'étanchéité lors de la dernière visite annuelle, en mars 2010. Il n'a pas été observé d'anomalie sur ces derniers après l'accident.
Conclusion
L'accident est dû au déclenchement du flutter d'ailerons, pour une raison qui n'a pas pu être déterminée. Le pilote a par réflexe maintenu le manche, et la commande de roulis s'est rompue.
(1)Le manuel de vol du F-CFLP indique une VNE de 265 km/h.
(2) n'est pas précisé de quel type de vitesse il s'agit.