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Perte de séparation entre un avion effectuant une approche de catégorie 2 et un avion au décollage

Perte de séparation entre un avion effectuant une approche de catégorie 2 et un avion au décollage

Autorité en charge

France - BEA

Progression de l'enquête Cloturée
Progress: 100%

Déroulement des vols

A 5 h 37, le contrôleur d'approche de Nantes informe l'équipage du F-GUGC, en provenance de Lyon, de la mise en place des procédures de visibilité réduite (LVP) sur l'aérodrome. Il lui communique les dernières observations : visibilité 4 000 mètres, BKN 200 ft avec de la brume. L'équipage demande au contrôleur d'approche de confirmer que les opérations de catégorie 3 (CAT III) ne sont pas réalisables. Cela lui est confirmé, il prépare alors une approche CAT II avec un atterrissage automatique et le Commandant de Bord (CDB) devient pilote en fonction (PF)(1) .

A 5 h 44, le contrôleur sol autorise l'équipage du F-GZHD, qui effectue un vol à destination de Djerba (Tunisie), à rouler depuis son point de stationnement jusqu'au point d'arrêt Alpha de la piste 03 (voir trajectoire ci-après).

A 5 h 45, le contrôleur d'approche autorise l'équipage du F-GUGC à intercepter l'ILS 03 et à réduire la vitesse à sa convenance.

A 5 h 48 min 22, l'équipage du F-GZHD s'annonce prêt au décollage approchant le point d'arrêt Alpha. Le contrôleur tour l'autorise à s'aligner et à décoller. Le F-GUGC, alors à environ 6 NM du seuil, intercepte l'ILS avec une vitesse estimée à 180 kt.

A 5 h 49, lors du premier contact avec l'équipage du F-GUGC, le contrôleur tour lui demande de réduire à la vitesse minimum d'approche. Peu après, observant le F-GZHD presque arrêté à proximité de la barre d'arrêt Alpha, le contrôleur demande à l'équipage s'il s'aligne. Celui-ci répond que la barre d'arrêt lumineuse avait été maintenue allumée. Alors que le F-GUGC se trouve à environ 2,8 NM du seuil, le contrôleur demande à l'équipage du F-GZHD de décoller immédiatement. Dix-huit secondes après, le contrôleur informe l'équipage du F-GUGC qu'un B737 s'aligne pour décoller. Vingt-quatre secondes plus tard, il l'informe que cet avion roule au décollage. L'équipage accuse réception des deux messages.

A 5 h 50 min 45, alors qu'il se trouve à une hauteur d'environ 90 ft, l'équipage du F-GUGC est autorisé à l'atterrissage. Le F-GZHD est alors en fin de roulement au décollage.

A 5 h 50 min 57, le F-GUGC atterrit ; le F-GZHD n'a pas encore survolé l'extrémité de la piste 03.

Lors du roulement à l'atterrissage, le CDB du F-GUGC constate un écart de trajectoire. Il déconnecte le pilote automatique pour maintenir l'axe.

Conclusion

L'incident résulte de la décision du contrôleur tour de ne pas demander l'interruption de l'approche du F-GUGC et du décollage du F-GZHD dès que la position du F-GZHD entre Bravo et Alpha a été constatée et alors que les normes de séparations LVP n'étaient plus vérifiées.

Enseignements

Gestion du roulage en LVP

Le contrôleur sol a autorisé l'équipage du F-GZHD à rouler directement jusqu'au point d'arrêt Alpha depuis son poste de stationnement. De fait, par anticipation, il l'a autorisé à franchir Bravo sans pouvoir prévoir la durée de la séquence de roulage. Or Bravo constitue un point remarquable pour une consigne associée aux LVP. Une procédure de roulage standardisée pour les LVP pourrait permettre de faciliter la prise en compte de cette consigne.

Connaissance des modes de fonctionnement des barres d'arrêt lumineuses

Les logiques de fonctionnement des barres d'arrêt lumineuses ne sont pas connues de tous les contrôleurs. Toutes les caractéristiques du fonctionnement ne peuvent pas être incluses dans le manuel d'exploitation. Une formation adaptée devrait permettre de lever les doutes liés à l'utilisation des équipements.

Utilité conventionnelle des LVP

Les LVP ont été mises en place en raison du plafond nuageux. Au moment de l'incident, la visibilité et l'évolution du plafond nuageux ont pu inciter le contrôleur tour à ne pas se conformer aux consignes locales et aux normes associées aux LVP.

Par définition, sous réserve que les minimums de l'exploitant soient respectés et en l'absence de dysfonctionnements mentionnés par NOTAM, les LVP assurent aux équipages que les dispositions nécessaires à la réalisation des approches de précision CAT II et CAT III sont vérifiées. Ainsi, les LVP étant en vigueur, l'équipage du F-GUGC n'était pas disposé à analyser de manière critique les deux informations qui lui ont été transmises par le contrôleur tour quant à l'alignement et au décollage du F-GZHD. D'autre part, les équipages ne sont pas tenus d'informer les contrôleurs de la catégorie d'approche effectuée. Ainsi, l'absence de réaction de la part de l'équipage a amené le contrôleur tour à supposer qu'il effectuait une approche CAT I, le confortant ainsi dans sa décision de ne pas demander l'interruption de l'approche.

Cela souligne le manque de robustesse d'un raisonnement fondé sur des éléments implicites et l'importance de se conformer au respect des normes en vigueur qui ont valeur de convention entre deux types d'opérateurs aux référentiels distincts.

Décision contrainte

Lorsqu'il a observé la présence du F-GZHD sur la piste, l'équipage du F-GUGC a décidé de ne pas interrompre l'approche, craignant une perte de séparation avec le F-GZHD en montée initiale, sans références visuelles extérieures. La gestion de la séquence par le contrôleur tour a donc contraint l'équipage à prendre, par défaut, la décision de poursuivre l'atterrissage.

Il est important que chaque acteur opérationnel s'efforce de maintenir les alternatives classiques à la disposition de celui avec qui il interagit afin de garantir l'intégrité de son processus décisionnel.

 

(1)Les procédures Air France prévoient que les approches CAT I avec RVR inférieures à 800 mètres, CAT II et CAT III sont conduites par le CDB en mode « autoland ».