Quasi-collision avec le sol lors de l'approche finale de nuit, remise de gaz
Quasi-collision avec le sol lors de l'approche finale de nuit, remise de gaz
Déroulement du vol
L'équipage effectue un vol entre Erevan (Arménie) et Nice, avec une arrivée prévue de nuit.
Au début de l'approche vers Nice, le contrôleur informe l'équipage que la procédure « VORa piste 04L » est en vigueur. Il lui indique ensuite que le vent est du 160° pour 18 kt et lui demande s'il accepte de continuer l'approche pour la piste 04L. Ce dernier accepte. L'équipage est ensuite autorisé à intercepter le radial 175° du VOR CGS puis à effectuer l'approche « VORa piste 04L » (voir point de la trajectographie ci-après).
Peu de temps après, l'avion traverse le radial sans l'intercepter. Le contrôleur demande à l'équipage de virer au cap 030°. Ce dernier ne collationne pas cette instruction et demande un dernier vent. Le contrôleur emploie la phraséologie d'urgence pour lui demander de virer au cap 090° et l'informe que la procédure en vigueur est désormais la « VORb piste 22R » (point ). Il lui demande ensuite s'il peut augmenter la vitesse vers 220 kt puis de rappeler lorsqu'il sera prêt à débuter l'approche. L'équipage obtient l'autorisation de prendre une vitesse de 160 kt.
Vers 18 h 20, l'équipage annonce qu'il est prêt pour l'approche. Le contrôleur lui demande alors de virer initialement au cap 060°, puis deux minutes plus tard de virer au cap 310° et d'intercepter le radial 089° du VOR AZR (point ).
Il lui demande ensuite s'il est établi sur le radial 089° (point ). L'équipage répond par l'affirmative et indique qu'il descend vers 1 500 ft. Au FAF, il met l'avion en descente puis évolue sous le plan de descente publié.
Après un premier contact avec le contrôleur LOC, celui-ci demande à l'équipage de continuer l'approche. Le contrôleur est ensuite lui-même occupé par la gestion d'un aéronef au décollage.
A environ 10 NM du DME AZR, l'avion passe sous les minimas de la procédure (1 500 ft) puis dévie vers la droite de l'axe d'approche finale. L'alerte MSAW(1) se déclenche quelques secondes plus tard et va durer 41 secondes ; l'avion vole au cap 300°, soit une déviation de 30° par rapport à l'axe d'approche, et est toujours en descente.
L'alarme APW(2) se déclenche onze secondes après l'alerte MSAW et va durer pendant 1 min 18 s. Le contrôleur LOC utilise la phraséologie d'urgence pour demander à l'équipage de virer à gauche au cap 270° (point ) ; l'équipage collationne. Le taux de descente de l'avion atteint 1 700 ft/min. Le contrôleur réitère son message et indique à l'équipage qu'il se trompe de baie « you're mistaking the bay ». L'avion atteint alors 550 ft. L'équipage vire à gauche et commence à remonter (point ), puis l'alerte MSAW s'arrête.
Sollicité par le contrôleur, l'équipage indique qu'il souhaite interrompre l'approche pour en effectuer une nouvelle.
Alors que l'avion est remonté vers 1 150 ft, le contrôleur demande à l'équipage de virer au cap 180° et de maintenir l'altitude puis de virer au cap 140° (point ). Au même moment l'alerte APW s'arrête. Le contrôleur demande de monter à 3 000 ft, puis réitère sa demande avec la phraséologie d'urgence (point ).
Le contrôleur demande ensuite de contacter le contrôleur d'approche afin d'effectuer une nouvelle approche « VORb piste 22R ». Lors de cette tentative, l'équipage coupe l'axe 089° sans l'intercepter. Le contrôleur lui demande de virer au cap 230° pour interception, ce que l'équipage collationne. L'alerte APW se déclenche à nouveau alors que l'avion est au nord de l'axe 089°. Le contrôleur emploie la phraséologie d'urgence en demandant de virer au cap 240° pour interception. L'équipage collationne, corrige la trajectoire et annonce qu'il a le terrain en vue. Le contrôleur lui demande de virer au cap 270° et de rester sur la fréquence. L'avion dévie à nouveau vers la droite de la trajectoire publiée. Le contrôleur demande à l'équipage de virer au cap 260° et lui indique de s'attendre à une approche à vue. Après s'être assuré que l'équipage a la piste en vue, le contrôleur lui demande de reprendre la navigation et de contacter la fréquence tour. L'alerte MSAW se déclenche à nouveau brièvement pendant trois secondes lorsque l'avion survole le Cap Ferrat à 1 200 ft. L'équipage atterrit en piste 22R.
Conclusion
L'incident est dû à l'exécution inadaptée de l'approche par l'équipage, dont les ressources ont pu être saturées par la gestion du changement de piste et la complexité de la procédure d'approche publiée.
La réaction du contrôleur à la suite du déclenchement de l'alarme APW a permis d'éviter un événement plus grave. Cependant, sa non-perception de l'alarme MSAW a contribué à la détection tardive de la déviation de la trajectoire de l'avion.
Recommandation
Rappel : conformément aux dispositions de l'article 17.3 du règlement n° 996/2010 du Parlement européen et du Conseil du 20 octobre 2010 sur les enquêtes et la prévention des accidents et des incidents dans l'aviation civile, une recommandation de sécurité ne constitue en aucun cas une présomption de faute ou de responsabilité dans un accident, un incident grave ou un incident. Les destinataires des recommandations de sécurité rendent compte à l'autorité responsable des enquêtes de sécurité qui les a émises, des mesures prises ou à l'étude pour assurer leur mise en œuvre, dans les conditions prévues par l'article 18 du règlement précité.
L'enquête a montré que les alertes MSAW, générées lors d'un rapprochement potentiellement dangereux d'un aéronef avec le relief ou un obstacle, ne sont pas toujours détectées par les contrôleurs. Lorsque leur attention est portée vers l'extérieur, l'alarme sonore associée n'est pas systématiquement perçue. Par ailleurs, la forte récurrence d'alertes MSAW indésirables a amené les contrôleurs à diminuer le volume sonore de ces alarmes, devenues gênantes. Ces derniers ont pu également s'habituer à entendre des alarmes qui ne les concernaient pas et ainsi occulter inconsciemment leur perception. Le système MSAW ne remplit donc plus complètement sa fonction d'alerte, affectant de fait sa pertinence et son efficacité.
Les modifications successives du paramétrage du système à Nice n'ont pas permis, à ce jour, de réduire de façon satisfaisante le nombre d'alertes non-souhaitables.
En conséquence, le BEA recommande :
- que la DGAC étudie les actions complémentaires nécessaires pour réduire le nombre d'alertes MSAW indésirables à Nice. [Recommandation FRAN-2013-057]
(1)Minimum Safe Altitude Warning.
(2)Area Proximity Warning, voir description ci-après.