Sortie latérale de piste lors de l'atterrissage, collision avec un obstacle situé dans la bande dégagée
Sortie latérale de piste lors de l'atterrissage, collision avec un obstacle situé dans la bande dégagée
1 - Déroulement du vol
Le pilote décolle de l'aérodrome de Saint-André-de-l'Eure (27) avec deux passagers pour un voyage. Il prévoit une escale sur l'aérodrome du Havre puis un survol de la Baie de Seine et un retour sur l'aérodrome de départ.
Après l'écoute de l'ATIS, le pilote contacte le contrôleur de la tour du Havre puis s'intègre en vent arrière pour la piste 04(1). Le contrôleur l'autorise à atterrir et lui annonce un vent du 330 pour 10 kt. Le pilote indique qu'il traverse des turbulences et majore alors sa vitesse à 140 km/h pour l'atterrissage. Il sort les volets en position « atterrissage ».
Le pilote explique qu'après le touché des roues, lors du début du freinage, l'avion vire brusquement à gauche et sort latéralement de la piste. Le pilote précise qu'il parvient à éviter trois rangées de balles de foin avant d'en heurter une autre avec l'aile droite. L'avion s'immobilise sur la bande dégagée.
2 - Renseignements complémentaires
2.1 Renseignements sur le pilote
Le pilote, âgé de 41 ans, est titulaire d'une licence de pilote privé avion de 2010. Il totalisait environ 116 heures de vol dont une centaine sur DR400.
2.2 Renseignements sur l'exploitant d'aérodrome
Au moment de l'accident, le protocole définissant les relations et engagements entre l'exploitant d'aérodrome et le Service de la Navigation Aérienne (SNA) comportait la consigne suivante :
« Les roundballers devront être stockés à l'extérieur de la bande et des aires critiques. » Aucune consigne particulière sur les délais de déplacement des balles de foin n'était mentionnée.
En mai 2000, la direction de l'Aviation Civile avait adressé à l'exploitant de l'aérodrome et aux exploitants agricoles en charge du fauchage des aires critiques un rappel sur les modalités de l'exploitation de ces aires. Ce rappel précisait que les balles de foin, dès leur fabrication terminée, devaient être stockées à 150 mètres au minimum du bord de la piste.
Depuis l'accident, le protocole a été amendé et stipule que les balles de foin, dès leur fabrication terminée, doivent être immédiatement enlevées et stockées à 150 mètres au minimum de l'axe de piste. Les exploitants agricoles sont, par ailleurs, signataires d'une convention reprenant cette consigne.
2.3 Témoignage de l'exploitant agricole en charge du fauchage des aires critiques de la piste
L'exploitant agricole indique qu'il est en charge du fauchage, depuis 1981, et qu'il a connaissance de la nécessité de libérer la bande dégagée de tout obstacle. Il ajoute que lors de la période de fauchage de juillet 2013, les conditions météorologiques et des problèmes techniques l'ont contraint à faire toutes les balles en même temps (environ 1 400) et ont retardé de plusieurs jours le déplacement de celles-ci. Aucune demande de déplacement des balles ne lui a été formulée par l'exploitant d'aérodrome ou le SNA.
2.5 Renseignements sur le Service de la Navigation Aérienne
La présence de balles de foin dans la surface dégagée de la piste était uniquement mentionnée dans l'ATIS du Havre. Il n'existait pas de NOTAM à ce sujet.
A la date de l'accident, les balles de foin étaient présentes depuis plus de cinq jours.
Le SNA n'avait pas demandé à l'exploitant d'aérodrome de faire le nécessaire afin de déplacer sans délais les bottes de foin présentes dans la bande dégagée.
2.6 Surveillance de l'autorité de l'Aviation Civile
Dans le cadre de ses activités de surveillance, la DSAC contrôle le contenu des protocoles signés entre un exploitant d'aérodrome et les tiers sous-traitants (les exploitants agricoles entre autres). L'absence de consignes précises relatives au fauchage dans le protocole en vigueur au moment de l'accident n'avait pas été identifiée par les inspecteurs de surveillance de la DSAC.
3 - Enseignements et conclusion
L'enquête de sécurité n'a pas permis d'établir avec certitude les causes de la sortie latérale de piste. Un freinage dissymétrique associé à la vitesse élevée choisie par le pilote pourrait en expliquer les circonstances.
Les endommagements de l'avion résultent de la collision avec une balle de foin située dans la bande dégagée de la piste.
L'enquête a montré que les facteurs suivants ont pu contribuer à la présence prolongée d'obstacles dans la bande dégagée :
- les contraintes météorologiques et opérationnelles ne permettant pas systéma-tiquement à l'exploitant agricole de procéder immédiatement au déplacement des balles de foin ;
- la sous-estimation par l'exploitant de l'aérodrome et par le SNA, du risque engendré par la présence de ces obstacles dans la bande dégagée en cas de sortie de piste.
La présence d'obstacles dans une bande dégagée représente un risque important pour les aéronefs. Lorsque des contraintes ne permettent pas d'atténuer ce risque dans les meilleurs délais, la décision de fermeture de la piste doit être envisagée.
(1)La piste 04/22 du Havre est une piste revêtue de 2 300 x 40 m, elle dispose d'une bande dégagée de 150 m de part et d'autre de l'axe de piste. Cette bande dégagée est destinée à réduire les risques de dommages matériels en cas de sortie de piste d'un aéronef et à assurer la protection des aéronefs qui survolent cette aire au cours des opérations de décollage ou d'atterrissage.