Accéder au contenu principal

Accident d’un parapente impliquant l’hélicoptère Airbus - EC135 - T2 PLUS immatriculé F-HTIN survenu le 11/05/2019 au Conquet (29)

Chute d’un parapentiste en vol de pente lors d’un croisement avec un hélicoptère en finale, collision avec le sol

Autorité en charge

France - BEA

Progression de l'enquête Cloturée
Progress: 100%

Rapport d'Enquête cat.2 : rapport de format simplifié, adapté aux circonstances de l'événement et aux enjeux de l'enquête.

L’hélicoptère a été appelé en mission de secours pour prendre en compte une personne blessée sur la plage du Conquet.
Le pilote, expérimenté, avait réalisé de nombreux vols et des approches sur des sites en dehors des aérodromes et il était familier de l’environnement entre Brest et Le Conquet. La mission du jour semblait simple dans son exécution. Lors de la préparation du vol, il a acquis les éléments (météorologie, espaces aériens) qui lui ont permis de prendre la décision de décoller. Il n’a pas reçu d’informations particulières de danger sur le site d’intervention. Dès l’envol, il a suivi une route directe vers la zone de récupération du blessé et a opté pour une aire d’atterrissage sur la plage au plus près de ce dernier.

Du fait de la courte durée du vol, le pilote a choisi une hauteur de vol peu élevée pour lui permettre de rejoindre rapidement le site. Pour cette même raison, le pilote a choisi de faire une approche semi-directe et sous un angle de descente constant qui l’a amené à un début de descente à 2 Nm travers est du site. Cette trajectoire a alors restreint son champ visuel à la plage, masquée par le relief qui la borde, quelques arbres hauts et des maisons.
Le pilote et le TCM ont noté alors la présence de kitesurfs sur la gauche tandis que le pilote poursuivait son approche. Lorsqu’il a passé les derniers reliefs et qu’il s’est présenté en finale, le pilote a vu le parapente, en avant de lui et à sa droite. Le pilote a assigné à chacune des personnes embarquées une tâche pour s’assurer de l’anti‑collision avec les différentes voiles.
L’hélicoptère était à 170 ft au-dessus de plage, le parapente devant lui à environ 300 m à sa droite.
Le choix d’effectuer une approche semi-directe sous un angle constant, sans reconnaissance du site par un passage à la verticale ne laissait au pilote qu’un choix restreint d’évolutions à partir du moment où il a observé les kitesurfs et le parapente.
Deux options se présentaient à lui : remettre les gaz pour se présenter de nouveau sur la plage avec un nouveau plan d’action, ou poursuivre l’approche finale jusqu’au poser. Il a rejeté la remise de gaz, pensant que la turbulence générée par le souffle de l’hélicoptère pouvait perturber le vol du parapente. Il a considéré que le risque pour le parapentiste était moindre à poursuivre l’atterrissage sur l’aire de posé identifiée car il avait le visuel sur ce dernier à droite de l’hélicoptère, légèrement plus bas.
Une arrivée à la verticale, voire sous un angle fort d’approche comme préconisée par le manuel de l’exploitant, aurait vraisemblablement alerté le parapentiste de l’arrivée de l’hélicoptère et des risques associés. Une telle arrivée aurait également laissé la possibilité au pilote de l’hélicoptère de prendre une autre trajectoire pour éviter le rapprochement avec le parapentiste. Le sentiment de maîtrise de la situation par le pilote, lié à son expérience, a vraisemblablement occulté la nécessité de prendre le temps d’analyser les obstacles par une reconnaissance complète de l’aire de poser.
La mise en place vers la plage ne présentait pas de difficultés majeures pour le pilote. Arrivé sur la plage, il a découvert presque brutalement une nouvelle situation avec des difficultés associées. Cette gestion de risques à court terme a placé l’équipage dans une impasse relative avec comme seules sorties la remise de gaz ou la poursuite de la trajectoire jusqu’à l’atterrissage mais dans des conditions défavorables (souffle, espace d’évolution restreint).
Le parapentiste était en vol de pente, il évoluait le long de la plage proche de la falaise en faisant des allers et retours. Il est vraisemblable qu’il n’a perçu l’hélicoptère que lorsqu’il volait vers le sud, l’hélicoptère étant alors à sa droite, plus haut. Bien que des témoins tentaient de l’alerter de la présence de l’hélicoptère, il ne pouvait uniquement le voir que lors de son évolution face au sud. Son champ d’évolution était alors restreint.
Dans cette configuration, le parapentiste ne pouvait ni virer à gauche ce qui l’aurait amené face au relief, légèrement au-dessus et avec du vent arrière, ni virer à droite du fait de la présence de l’hélicoptère. De plus il est vraisemblable que le parapentiste, qui évoluait à faible hauteur, n’a pas voulu descendre rapidement en fermant sa voile au risque de se blesser. Une descente dans l’idée d’atterrir en vent arrière n’offrait que peu de sécurité.
Par conséquence et dans l’hypothèse où le parapentiste a identifié la présence de l’hélicoptère en trajectoire contraire et a pris en compte le risque associé, il est vraisemblable qu’il a souhaité continuer sur sa trajectoire, cette solution présentant le moindre risque.
L’absence de manœuvre de la part du parapentiste peut également indiquer qu’il n’avait pas conscience du danger que représentait à cet instant la turbulence de sillage qui, compte tenu du vent, allait être rabattue vers la falaise.

 

 

Le BEA émet 1 recommandation de sécurité:

- Recommandation FRAN-2021-007 / Evaluation des ordres de grandeur des turbulences de sillage générées par un hélicoptère par comparaison à un avion de masse équivalente et partage de ces informations pour sensibiliser la communauté aéronautique.

Lors de l’enquête sur cet accident, plusieurs documents ont été étudiés, notamment des textes règlementaires, des manuels d’instruction et des études réalisées sur la turbulence de sillage.

Bien que peu d’études se soient attachées à spécifiquement comparer les caractéristiques des turbulences de sillage avion et hélicoptères, les études identifiées par le BEA suggèrent que les turbulences de sillage des hélicoptères sont équivalentes à celles d’avions de masse nettement plus importante.

De plus, les manuels destinés à l’instruction des pilotes privés avion et ULM mentionnent des dangers provoqués par la turbulence de sillage engendrée par des avions de transport ou, de façon générale, par des aéronefs à voilure fixe. Il n’est pas précisé l’importance et les dangers de la turbulence de sillage générée par les hélicoptères alors que celle-ci peut être relativement plus importante que celle d’un avion de masse comparable.

Des rapports d’enquête de sécurité mentionnent la turbulence de sillage comme facteur contributif voire comme cause d’accident. Certains de ces rapports ont amené des autorités à informer des dangers de la turbulence de sillage, à promouvoir cette information, et parfois à envisager que des études sur la turbulence de sillage soient entreprises pour mieux classifier les hélicoptères.

En conséquence, le BEA recommande que :

- considérant le danger associé à la turbulence de sillage générée par le déplacement des hélicoptères même légers ;

- considérant la méconnaissance de la communauté aéronautique (exploitants, pilotes et autorités de certification) sur la turbulence de sillage associée au déplacement des hélicoptères ;

l’AESA, en coordination avec les principaux constructeurs d’hélicoptères européens, évalue des ordres de grandeur des turbulences de sillage générées  par un hélicoptère par comparaison à un avion de masse équivalente  et partage ces informations pour sensibiliser la communauté aéronautique.
 

Le suivi de cette recommandation est en cours

Suivi disponible sur SRIS2: cliquez ici

___________________________________________________________________

Rappel : conformément aux dispositions de l’article 17.3 du règlement n° 996/2010 du Parlement européen et du Conseil du 20 octobre 2010 sur les enquêtes et la prévention des accidents et des incidents dans l’aviation civile, une recommandation de sécurité ne constitue en aucun cas une présomption de faute ou de responsabilité dans un accident, un incident grave ou un incident. Les destinataires des recommandations de sécurité rendent compte à l’autorité responsable des enquêtes de sécurité qui les a émises, des mesures prises ou à l’étude pour assurer leur mise en œuvre, dans les conditions prévues par l’article 18 du règlement précité.