Perte de puissance du moteur, atterrissage forcé en campagne
Perte de puissance du moteur, atterrissage forcé en campagne
CIRCONSTANCES
Le pilote et son passager effectuent un vol local au-dessus des Pyrénées, au départ et à destination de l'aérodrome de Muret (31).
Le pilote indique qu'après environ cinquante minutes de vol, des vibrations apparaissent pendant la descente entre Saint-Girons (09) et Cazères (31), et que le débit de carburant diminue. Il actionne la pompe électrique et sélectionne l'autre réservoir de carburant. Ses actions sur la manette des gaz n'ont pas d'effet. La puissance est insuffisante pour maintenir le vol en palier et les vibrations perdurent. Le pilote atterrit dans un champ.
L'examen du circuit de carburant du moteur montre que trois des six injecteurs sont partiellement obstrués par une pollution également mise en évidence dans le répartiteur de carburant.
La pollution retrouvée comprend :
- des particules métalliques provenant de la corrosion de plusieurs éléments du circuit de carburant du moteur (le répartiteur, le ressort du bloc doseur, deux autres raccords et la pompe mécanique), et
- des particules minérales très fines, d'origine extérieure au circuit de carburant de l'avion.
Le filtre décanteur situé en aval de la pompe électrique à carburant est propre. Les prélèvements de carburant effectués en différents points du circuit de carburant du moteur présentent une pollution sédimentaire dont la nature pourrait correspondre à celles des particules minérales précédemment mentionnées.
Cette pollution minérale, bien qu'indésirable, n'est pas suffisante pour provoquer à elle seule la corrosion. Cette dernière est la conséquence d'une pollution du circuit par l'eau. Les particules métalliques libérées par la corrosion se sont accumulées dans le répartiteur avec les particules minérales jusqu'à obstruer partiellement les injecteurs. Les examens n'ont pas permis de dater le début de la corrosion.
La lettre de service SIL 99-1 de Teledyne Continental contient la recommandation générale suivante :
« Une attaque de corrosion peut survenir dans les moteurs qui sont utilisés occasionnellement, quelle que soit la localisation géographique. Dans les régions côtières ou très humides, une attaque de corrosion peut survenir en deux jours seulement. La meilleure méthode pour réduire la probabilité d'une attaque de corrosion est de faire voler l'avion chaque semaine au moins une heure ».
Ce document, ainsi que le manuel de maintenance de Cirrus prévoient les actions à entreprendre en cas d'immobilisation temporaire (définie comme allant de 30 à 90 jours). On y trouve en particulier les informations suivantes :
les réservoirs de carburants doivent être complètement remplis et l'absence d'eau vérifiée chaque semaine ;
toutes les ouvertures du moteur vers l'air extérieur doivent être obturées par des bouchons ou des caches.
Ainsi, il est possible qu'une longue période d'immobilisation du moteur ait favorisé la présence d'eau dans le circuit, par condensation ou en conséquence d'un défaut d'étanchéité lors du stockage. Le moteur a été installé neuf sur l'avion en septembre 2005. Celui-ci a été exploité de manière régulière par un aéroclub de la région parisienne. En août 2008, le moteur a été renvoyé en atelier à la suite de la détection d'une crique sur le carter. Cette immobilisation a duré onze semaines. Il a ensuite été remonté sur l'avion et régulièrement utilisé. Fin octobre 2010, l'atelier d'entretien a effectué un nettoyage des injecteurs à la suite d'une remarque d'un pilote sur le fonctionnement anormal du moteur. Le mécanicien explique qu'un des injecteurs était bouché par ce qui lui est apparu être un brin de paille. Le filtre décanteur était propre. L'avion a été remis en service. De novembre 2010 à mars 2011, date de l'achat par le club de Muret, l'avion a peu volé : on note deux périodes d'immobilisation de trois semaines et une d'un mois.
Le chef pilote du club indique que les purges des réservoirs sont faites régulièrement par les pilotes.
CONCLUSION
La perte de puissance résulte d'une obstruction des injecteurs par une pollution d'origine minérale et métallique, cette dernière étant elle-même la conséquence d'une corrosion de certains éléments du circuit de carburant. L'enquête n'a pas permis de déterminer le mécanisme par lequel de l'eau a pu contaminer le circuit et entraîner cette corrosion, ni l'origine de la pollution minérale observée.